Evolution des régions non-recombinantes sur les chromosomes de types sexuels chez les champignons du genre Microbotryum
Auteur / Autrice : | Fantin Carpentier |
Direction : | Tatiana Giraud |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Biologie |
Date : | Soutenance le 19/11/2019 |
Etablissement(s) : | Université Paris-Saclay (ComUE) |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sciences du végétal : du gène à l'écosystème (Orsay, Essonne ; 2015-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Écologie, systématique et évolution (Orsay, Essonne ; 2002-....) |
établissement opérateur d'inscription : Université Paris-Sud (1970-2019) | |
Jury : | Président / Présidente : Cécile Fairhead |
Examinateurs / Examinatrices : Tatiana Giraud, Cécile Fairhead, Susana M. Coelho, Bart Nieuwenhuis | |
Rapporteur / Rapporteuse : Susana M. Coelho, Alex Widmer |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Mots clés libres
Résumé
Chez les organismes sexués, des suppressions de recombinaison peuvent évoluer dans certaines régions génomiques pour conserver des combinaisons d’allèles bénéfiques, ce qui aboutit à la transmission de plusieurs gènes en un seul locus, alors appelé « supergène ». Les supergènes déterminent des phénotypes complexes, comme l’identité sexuelle chez les organismes qui ont des chromosomes sexuels. Sur certains chromosomes sexuels, la région sans recombinaison s’est étendue plusieurs fois successivement, produisant des « strates évolutives ». Il est communément admis que ces strates évolutives sont issues de liaisons successives de gènes sexuellement antagonistes (qui ont des allèles bénéfiques à un sexe mais délétère à l’autre) à la région qui détermine le sexe, mais peu de preuves empiriques soutiennent cette hypothèse. Les champignons constituent des modèles intéressants pour étudier les causes évolutives des suppressions de recombinaison parce qu’ils peuvent avoir des chromosomes de types sexuels non recombinants sans être associés à des fonctions mâles ou femelles. Dans cette thèse, nous avons étudié l’évolution de la suppression de recombinaison sur les chromosomes de type sexuel chez les champignons castrateurs de plantes du genre Microbotryum. Chez les champignons Microbotryum, les croisements ne sont possibles qu’entre des gamètes qui ont des allèles distincts aux deux locus de types sexuels. Nous avons montré que les suppressions de recombinaison ont évolué plusieurs fois indépendamment pour lier les deux locus de types sexuels, depuis l’état ancestral avec les locus de types sexuels situés sur deux chromosomes différents. La suppression de recombinaison a soit lié les locus de types sexuels à leur centromère respectif, ou a lié les locus de types sexuels entre eux après que des réarrangements chromosomiques, différents dans les différentes espèces, les aient amenés sur le même chromosome. Les deux sortes de suppression de recombinaison sont bénéfiques sous le mode de reproduction par auto-fécondation intra-tétrade de Microbotryum, parce qu’ils augmentent le taux de compatibilité entre gamètes. Les suppressions de recombinaison ont donc évolué plusieurs fois indépendamment via des chemins évolutifs et des changements génomiques différents, ce qui renseigne sur la répétabilité de l’évolution. De plus, nous avons révélé l’existence de strates évolutives sur les chromosomes de type sexuels de plusieurs espèces de Microbotryum, ce qui remet en cause le rôle de l’antagonisme sexuel dans la formation de strates évolutives, les types sexuels n’étant pas associés à des fonctions mâles / femelles. Des études précédentes ont rapporté peu de différences phénotypiques associées aux types sexuels, ce qui rend peu probable qu’une sélection antagoniste existe entre types sexuels sur de nombreux gènes (l’existence de gènes avec des allèles bénéfiques à un type sexuel mais délétère à l’autre). Certains gènes situés dans les régions non-recombinantes des chromosomes de types sexuels étaient différentiellement exprimés entre types sexuels, mais nos analyses suggèrent qu’un tel différentiel d’expression peut être dû à la dégénérescence. En effet, des mutations délétères s’accumulent dans les régions non-recombinantes, ce qui peut modifier l’expression des gènes ou les séquences protéiques. Nous avons donc conclu que la sélection antagoniste ne peut pas expliquer la formation des strates évolutives chez les champignons Microbotryum. Par conséquent, des mécanismes alternatifs doivent être considérés pour expliquer l’extension progressive des régions non-recombinantes, et ces mécanismes pourraient aussi générer des strates évolutives sur les chromosomes sexuels. Ces travaux incitent de futures études à d’une part identifier d’autres strates évolutives qui ne sont pas associées à des fonctions mâles/femelles, et d’autre part à identifier leurs causes évolutives et leurs conséquences en termes de dégénérescence.