Le mode de gestion d’une industrie à risques, ses évolutions et ses effets : le cas de la maintenance sous-traitée des Centres Nucléaires de Production d’Électricité d’EDF
Auteur / Autrice : | Léna Masson |
Direction : | Julienne Brabet |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sciences de Gestion |
Date : | Soutenance le 06/12/2019 |
Etablissement(s) : | Paris Est |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Organisations, marchés, institutions (Créteil ; 2010-) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Institut de recherche en gestion (Créteil) - Institut de Recherche en Gestion / IRG |
Jury : | Président / Présidente : Rémi Jardat |
Examinateurs / Examinatrices : Julienne Brabet, Anne Dietrich, Bernadette Seignour, Mathieu Detchessahar, Benoît Journé, Gérard Koenig | |
Rapporteur / Rapporteuse : Anne Dietrich, Bernadette Seignour |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
Réalisée dans le cadre d’une convention CIFRE, cette thèse étudie les évolutions des systèmes de gestion intra et inter-organisationnels d’une organisation à risques, ainsi que leurs effets sur le niveau local principalement sur les relations et les situations de travail lors des opérations de maintenance sous-traitées.Éclairées par les travaux de recherche portant sur les organisations à risques, la sous-traitance et les processus de régulation, ces analyses articulent les niveaux macro (l’entreprise dans son contexte), méso (la Division Production de l’entreprise, ses dispositifs de gestion) et micro (les sites de production, les relations et situations de travail).Reposant sur l’utilisation d’une méthodologie « ancrée » et « opportuniste », la recherche empirique mobilise de nombreuses données issues d’entretiens, d’observations, et de documents internes.Le contexte socio-économique, le néo-libéralisme (s’incarnant ici dans le New Public Management et l’externalisation), le changement de statut de l’entreprise, sa situation financière dégradée, la surveillance d’une agence extérieure, pèsent sur les choix de la Division Production, contribuant à faire évoluer son mode de gestion. Accroissement de la centralisation, de la standardisation, du recours à la sous-traitance pour les opérations de maintenance, de la contractualisation, de la mise en concurrence des acteurs, des contrôles, ainsi qu’un important renouvellement générationnel sont les principales évolutions de cette organisation centrée sur la sécurité industrielle et la maîtrise de ses coûts.Au niveau local, les choix réalisés par la Division Production, traduits dans l’évolution des dispositifs de gestion intra-organisationnels, produisent divers effets, comme l’érosion des compétences techniques des agents de l’entreprise, ou encore des cloisonnements interprofessionnels pouvant entraver la coordination efficace des activités sous-traitées. Une forte coopération avec les sous-traitants est également rendue plus difficile par le risque de délit de marchandage –limitant les relations entre les opérateurs du donneur d’ordre et ceux des sous-traitants – ainsi que par la complexité bureaucratique qui ralentit la circulation de l’information. Ces difficultés s’intensifient alors que les pressions sur les durées et les coûts que vivent les entreprises sous-traitantes et les agents du donneur d’ordre s’accentuent, et que des sanctions financières – accompagnant les erreurs sur les chantiers – sont plus régulièrement appliquées, affaiblissant la confiance inter-organisationnelle.Les relations que les sites entretiennent avec les sous-traitants, différentes selon le site mais de plus en plus dépendantes des orientations du niveau national, affectent les comportements des sous-traitants et la façon dont ils réalisent le travail, contribuant tantôt à rapprocher le réel du prescrit, tantôt à l’en éloigner. Les opérateurs sous-traitants qui rencontrent de nombreux aléas, peuvent difficilement contribuer aux aménagements nécessaires dans la conception des activités (complexes et strictement programmées) qu’ils réalisent, malgré l’existence d’un système de retour d’expérience. Ils tendent à développer des comportements de retrait atténués par une culture de professionnalisme et de sécurité partagée par tous, permettant de faire face aux aléas.Les déconnexions horizontales et verticales, couplées à une pression temporelle et financière accrue, forment ainsi un système de contraintes produisant des effets sur les situations et les relations de travail. Le sommet stratégique, qui promeut partenariats et simplification, tente d’en juguler les conséquences sans pouvoir renoncer aux logiques institutionnelles qui le structurent.Améliorer et compléter les dispositifs de co-régulation constitue l’une des voies qui favoriseraient la conciliation des exigences contradictoires de performance économique, de strict respect des procédures de sécurité et d’autonomie des collectifs de travail.