Thèse soutenue

Caractérisation de l'impact des feux anthropiques de la période pré-colombienne sur la végétation forestière de la Réserve Naturelle des Nouragues en Guyane française par une approche anthracologique

FR  |  
EN
Auteur / Autrice : Stéphanie Bodin
Direction : Laurent Bremond
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Ecologie et Biodiversité
Date : Soutenance le 25/11/2019
Etablissement(s) : Montpellier
Ecole(s) doctorale(s) : École Doctorale GAIA Biodiversité, agriculture, alimentation, environnement, terre, eau (Montpellier ; 2015-...)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Institut des sciences de l'évolution (Montpellier)
Jury : Président / Présidente : Stéphanie Thiébault
Examinateurs / Examinatrices : Laurent Bremond, Stéphanie Thiébault, Étienne Dambrine, Isabelle Théry-Parisot, Jean-François Molino, Bernard Riéra, Pierre-Olivier Antoine
Rapporteurs / Rapporteuses : Étienne Dambrine, Isabelle Théry-Parisot

Résumé

FR  |  
EN

La forêt amazonienne a longtemps été considérée « vierge » de tout impact humain ancien. Pourtant, les preuves contredisant cette idée reçue s’accumulent depuis quelques décennies, parmi lesquelles de vastes étendues de terras pretas. Ce sont des sols fortement enrichis et très fertiles dont l’origine anthropique est certaine. Ils témoignent de l’impact considérable qu’ont eu les sociétés précolombiennes sur leur milieu. Beaucoup d’études se sont concentrées sur l’Amazonie centrale et occidentale où les zones à terra preta sont nombreuses et abritent une végétation très diversifiée. Le plateau des Guyanes n’a pas bénéficié du même intérêt. Pourtant, les indices de l’occupation humaine ancienne sont nombreux et, comme sur les sites à terra preta, on trouve en certains endroits de nombreuses espèces utiles, plus abondantes que dans le cas d’une dispersion naturelle. C’est dans ce contexte que s’inscrit cette thèse, qui s’intéresse à l’impact des populations précolombiennes sur la végétation forestière de la Réserve des Nouragues en Guyane française. Ce travail vise à caractériser cet impact grâce à une approche anthracologique – l’identification des charbons de bois, une méthode très peu utilisée dans les milieux tropicaux. De ce fait, une partie importante de la thèse est consacrée à la méthodologie. Dans un premier temps, une clé d’identification spécifiquement adaptée aux caractères anatomiques observables sur les charbons de bois et ciblant les espèces de Guyane a été mise en place afin de faciliter le processus d’identification. Cette clé est téléchargeable en ligne et est éditable, de telle sorte qu’il est possible d’y ajouter de nouvelles descriptions et de nouveaux taxons. Ensuite, différentes méthodes d’échantillonnage des charbons – sur profils de sol, à la tarière et prélèvements opportunistes sur buttes de déracinement ou lors de creusements – ont été comparées. Les résultats montrent que les deux premières méthodes permettent de récolter la même quantité de charbons mais pas la même diversité taxonomique. Le prélèvement sur un profil de sol permet souvent d’obtenir plus de diversité que les tarières à cause des assemblages souvent monospécifiques fournis par ces dernières. Néanmoins, presque chaque nouvelle tarière permet de récupérer un nouveau taxon, comme le prélèvement opportuniste. Un protocole d’échantillonnage combinant plusieurs fosses, des sondages tarière et des prélèvements opportunistes est donc proposé afin de garantir une meilleure diversité et une meilleure représentativité des assemblages anthracologiques. Enfin, les datations effectuées sur les charbons récoltés au cours de la thèse indiquent que les Nouragues ont connu deux grandes périodes d’occupation s’étendant entre 1300-1000 ans cal BP et 600-400 ans cal BP. Les assemblages anthracologiques montrent que ces occupations ont induit des changements de végétation importants sur certains sites. En effet, sur deux des sites étudiés, la forêt a laissé place à des formations végétales très différentes, dominées par des poacées bambusiformes ou des lianes. Les résultats suggèrent que l’une des formations de bambous pourrait s’être mise en place après l’abandon d’une parcelle de culture semi-permanente, rejoignant ainsi des hypothèses formulées dans des travaux d’écologie historique antérieurs. Les résultats des analyses anthracologiques montrent également la présence d’espèces utiles et de végétation secondarisée, traduisant ainsi l’impact des populations sur le milieu forestier. Enfin, la sélection du bois de feu semble avoir été adaptée en fonction de la végétation locale. Le type d’activité à l’origine de ces changements de végétation reste à définir et la compréhension des sites précolombiens de Guyane française, comme partout ailleurs en Amazonie, devrait être améliorée grâce aux apports complémentaires d’autres disciplines.Mots clés : Terres noires amazoniennes, Guyane, Anthracologie, Charbon, Période précolombienne, Forêt tropicale