Thèse soutenue

Lecture d'un couple de qudits nucléaires avec un transistor moléculaire

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Auteur / Autrice : Hugo Biard
Direction : Franck BalestroWolfgang Wernsdorfer
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Nanophysique
Date : Soutenance le 13/02/2019
Etablissement(s) : Université Grenoble Alpes (ComUE)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale physique (Grenoble ; 1991-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Institut Néel (Grenoble)
Jury : Président / Présidente : Olivier Buisson
Examinateurs / Examinatrices : Cyrille Train
Rapporteurs / Rapporteuses : Maria Luisa Della Rocca, François Montaigne

Résumé

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La réalisation d’un ordinateur quantique est l’un des objectifs scientifiques les plus ambitieux et prometteurs de ce début de siècle.La force du calcul quantique réside dans sa capacité à se placer dans une superposition d’états et à utiliser les interférences entre eux pour dépasser la limite intrinsèque des ordinateurs classiques, qui est la description discrète des phénomènes physiques pourtant continus. Cela leur permettrait théoriquement de simplifier et de résoudre des problèmes insolubles pour les ordinateurs classiques.La première étape dans la réalisation d’un ordinateur quantique est sa brique de base : le bit-quantique, ou qubit. Il s’agit de l’analogue quantique du bit classique, qui permet de stocker l’information sous la forme de 0 ou de 1. Dans le cas quantique, l’information est formée par la superposition de ces deux états, en un nombre infini de possibilités. Si cette étape a été réalisée à de nombreuses reprises par la communauté, en utilisant des qubits de différentes natures, le couplage entre plusieurs d’entre eux reste difficile et limité en nombre. En effet, le système quantique ainsi formé a tendance à perdre sa cohérence ; ou dit autrement, à se détruire.Parmi les nombreuses possibilités de qubit existant, j’utilise le spin nucléaire. Ils ont l’avantage d’être relativement bien découplés de leur environnement, ce qui permet de les protéger des sources extérieures de décohérence et ainsi d’avoir un temps de vie supérieur aux spins électroniques.Cet avantage a un prix : il est plus difficile d’accéder à leur lecture.Pour ce faire, j’ai fabriqué un transistor moléculaire afin de connecter une molécule unique à deux centres magnétiques, le Tb2Pc3, aux électrodes de source et drain. L’aimant monomoléculaire utilisé possède deux centres magnétiques (les ions Tb3+) dont les spins électroniques J=6 sont couplés entre eux via une interaction dipolaire. De plus, chacun d’entre eux est couplé à son spin nucléaire I=3/2 via l’interaction hyperfine. On a ainsi un couple de deux qudits (d=4), ce qui porte la dimension de l’espace de Hilbert à 16, et ce à l’intérieur d’une unique molécule.Dans un premier temps, j’ai élaboré le diagramme Zeeman de la molécule, qui est sa réponse énergétique à un champ magnétique extérieur. Je détaille ensuite la fabrication des échantillons, et notamment l’utilisation de la technique d’électromigration. Je présente ensuite les mesures en transport électrique, aux très basses températures (milliKelvins) et sous champ magnétique, qui permettent de détecter le retournement du couple de spins électroniques, dont la position est dépendante de l’état du couple de spins nucléaires : c’est ainsi qu’est réalisée la lecture des états du couple de qudits.Une étude de la dynamique du système est alors réalisée par des mesures de corrélations entre la position des retournements des spins électroniques entre deux balayages consécutifs. On obtient ainsi, à la fois une meilleure visualisation des états du système, mais aussi de sa relaxation entre deux balayages en champ magnétique.Enfin, j’ai pu extraire sa température effective à l’aide d’une distribution de Maxwell-Boltzmann. De l’ordre de 300 mT, elle est cohérente avec la littérature, ainsi qu’avec celles extraites sur deux autres transistors moléculaires obtenus à d’autres moments de ma thèse.En résumé, cette thèse montre pour la première fois l’utilisation d’un transistor à molécule unique pour accéder à lecture d’un couple de qudits. Le grand nombre de molécules existantes, et le grand nombre de qubits ou qudits qui pourrait y être couplé, fait de la spintronique moléculaire une voie très prometteuse vers de possibles futurs ordinateurs quantiques moléculaires.La prochaine étape sera d’opérer la manipulation cohérente d’un tel système, notamment via l’utilisation de l’effet Stark, comme cela a déjà été réalisé à l’aide d’une molécule ne comportant qu’un centre magnétique.