Thèse soutenue

L’Espagne face à son passé : écriture romanesque et stratégies documentaires

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Auteur / Autrice : Lucas Merlos
Direction : Jean-François Carcelén
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Études Hispaniques et Hispano-Américaines
Date : Soutenance le 29/11/2019
Etablissement(s) : Université Grenoble Alpes (ComUE)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale langues, littératures et sciences humaines (Grenoble, Isère, France ; 1991-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Institut des langues et cultures d'Europe, Amérique, Afrique, Asie et Australie (Grenoble ; 2015-....)
Jury : Président / Présidente : Christine Pérès
Examinateurs / Examinatrices : Catherine Orsini-Saillet, Jaume Peris Blanes
Rapporteurs / Rapporteuses : Christine Pérès, Amélie Florenchie

Résumé

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Cette thèse vise à définir les contours d’une nouvelle modalité du traitement romanesque du passé apparue dans les lettres espagnoles à l’orée du XXIe siècle : le roman documentaire de la mémoire. Un nombre significatif de récits littéraires réalistes, et parfois factuels, portent sur le passé de l’Espagne contemporaine, généralement dans ses aspects les plus traumatiques – guerre civile, Franquisme, violences lors de la Transition –. Pour accéder à ce passé et le représenter, ils mobilisent le document et des formes documentaires à l’image du document d’archive ou du témoignage. Nous posons comme hypothèse que cette mobilisation et cette mise en scène des sources historiques dans un cadre littéraire revient à construire des récits sur l’origine de l’Espagne actuelle à même de participer à l’élaboration d’un récit mémoriel commun et, dans le même mouvement, à interroger et à revendiquer la place de la littérature dans la constitution des savoirs. Dans cette perspective, les romans documentaires de la mémoire constitueraient le lieu d’une tension entre document et monument, entre connaissance et reconnaissance. Pour mettre à l’épreuve cette double hypothèse identitaire d’une reconfiguration de la mémoire et d’une expansion du champ de la littérature, nous procédons à une analyse des diverses stratégies documentaires à l’œuvre dans quatre romans documentaires de la mémoire représentatifs de la diversité idéologique et esthétique de ce sous-genre narratif (Isaac Rosa, El vano ayer, 2004 ; Benjamín Prado, Mala gente que camina, 2006 ; Javier Cercas, Anatomía de un instante, 2009 ; Andrés Trapiello, Ayer no más, 2012). Nous décrivons et interprétons tout d’abord les modalités documentaires à l’œuvre dans ces récits sous le prisme de la notion d’effet de document. Nous constatons ainsi que les récits mobilisent le document et mobilisent des codes narratifs factuels afin de constituer des documents mémorables. Nous abordons dans un second temps la figure du narrateur-enquêteur, qui, animés par un « mal d’archive », retournent aux sources de l’Espagne actuelle et engagent le lecteur à s’identifier à leurs quêtes et aux récits qu’elles induisent. Enfin, nous montrons dans un troisième temps comment ces textes, par le biais de montages documentaires mais aussi par la reprise partielle ou totale des codes du roman à thèse, s’intègrent sur un mode contre-discursif dans un interdiscours large et interrogent ainsi la place de la littérature et de l’écrivain dans le champ des discours sur le réel.