Faim de Droits : le don à l'épreuve des violences alimentaires
Auteur / Autrice : | Bénédicte Bonzi |
Direction : | Birgit Müller |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Anthropologie sociale et ethnologie |
Date : | Soutenance le 18/06/2019 |
Etablissement(s) : | Paris, EHESS |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale de l'École des hautes études en sciences sociales |
Jury : | Président / Présidente : Michel Agier |
Examinateurs / Examinatrices : Michel Agier, Philippe Chanial, Deborah Puccio-Den, Anne-Emmanuelle Fiamor | |
Rapporteur / Rapporteuse : Philippe Chanial, Deborah Puccio-Den |
Mots clés
Résumé
Le droit à l’alimentation est un droit fondamental. Pourtant l’accès direct, régulier et en quantité suffisante à la nourriture n’est toujours pas garanti en France pour l’ensemble de la population. Afin de pallier ce manque, des associations, dont les Restos du Cœur, s’organisent sur le territoire. Ainsi, des personnes bénévoles donnent de la nourriture à ces hommes et ces femmes dans le besoin. Ils mettent en œuvre un droit par le bas, et de cette manière, contiennent une violence. Cette violence prend forme dans ce que je nomme les violences alimentaires, elles peuvent être décrites par les atteintes physiques et morales faites à celle ou celui qui doit faire la queue pour pouvoir se nourrir dans un pays où la nourriture est abondante. Il s’agit de rendre visible l’invisible par la description de situations dans lesquelles, la tension toujours présente donne lieu tant à l’expression de violences qu’à l’ingéniosité des réponses apportées de manière viscérale et spontanée par des donateurs engagés. Aujourd’hui, avec l’implémentation de la Loi Garot (2016) deux circuits et logiques de don s’opposent et se complémentent : le don indirect par les supermarchés des marchandises non-vendues et détaxées créateur d’une valeur marchande et le don direct de temps et d’attention par les bénévoles expression de valeurs morales. L’économie du don : demander, donner, recevoir, rendre (Mauss) permet de saisir cette économie morale (E.P. Thomson) proche d’un acte de résistance à la marchandisation. Elle répond à l’injustice de l’abandon (Agamben) par le maintien d’un lien social. Mais face à elle se révèle une économie de marché régie par appels d’offre, mise en concurrence et aménagements fiscaux qui excluent les plus vulnérables et tentent de pénétrer le secteur de l’aide via des normes et une disciplinarisation (Foucault) des organisations. C’est dans cette tension que les violences alimentaires surgissent, quand la faim des uns peut en enrichir d’autres. En suivant l’expérience que font les bénéficiaires de l’aide alimentaire, ces personnes qui souffrent de la faim et recourent aux dons de nourriture, ce travail interroge la responsabilité et le rôle de l’Etat français quant à l’application du droit à l’alimentation, droit qu’il a ratifié et inscrit dans le code rural, mais qui n’est pas réalisé.