Thèse soutenue

Dissimulation et quête d’identité dans les romans de Hue de Rotelande

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Auteur / Autrice : Céline Véran
Direction : Françoise Laurent
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Littérature française
Date : Soutenance le 14/12/2019
Etablissement(s) : Université Clermont Auvergne‎ (2017-2020)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale des lettres, sciences humaines et sociales (Clermont-Ferrand)
Partenaire(s) de recherche : Equipe de recherche : Centre de Recherches sur les Littératures et la Sociopoétique (Clermont-Ferrand, Puy-de-Dôme, France)
Jury : Examinateurs / Examinatrices : Keith Busby, Patrick Del Duca, Danièle James-Raoul, Laurence Mathey-Maille, Silvère Menegaldo

Résumé

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Hue de Rotelande, poète anglo-normand de la fin du XIIe siècle, a écrit deux romans en vers, Ipomédon et Prothésélaüs, dont les héros s’évertuent soit à cacher leur nom, soit à se faire reconnaître. La seconde œuvre est présentée comme une continuation du premier roman, mais on perçoit que l’unité se fait également grâce à la thématique de l’identité. À cette période du Moyen Âge, une interrogation sur l’identité n’est pas anachronique. Le chapitre I montre qu’au moment où s’épanouit la fameuse Renaissance du XIIe siècle, la question sur l’identité se posait dans plusieurs domaines, tant sur un plan théologique que par rapport à la reconnaissance de l’individu. Les œuvres de Hue de Rotelande témoignent de cette émergence du sujet. Pour autant, une personne se définit encore essentiellement grâce au groupe auquel elle appartient. La réflexion sur l’identité n’a ainsi rien à voir avec la naissance de l’individualité mais doit se comprendre par rapport à un groupe. Par ailleurs, la conscience de la nation commençait à se former, à la fin de ce siècle, en Angleterre, stimulée par l’action d’Henri II. En effet, le roi devait unir son royaume en butte aux oppositions liées à son origine continentale et à la contestation galloise ; autour du roi, l’Histoire était réécrite. Avec ce thème de l’identité, les œuvres de Hue de Rotelande sont donc un reflet de leur époque. Dans le chapitre II, l’on constate que ces romans abordent l’identité de façon paradoxale puisqu’est mise en avant la dissimulation. Néanmoins, une analyse lexicale prouve que la sphère conceptuelle de la dissimulation rejoint celle de l’identité. Et Hue de Rotelande imprègne véritablement ses œuvres de cette double thématique en multipliant les procédés de la dissimulation, en brouillant le système de construction des personnages et, surtout, en présentant cette dissimulation de l’identité comme n’étant pas véritablement motivée sur le plan narratif. Il est donc particulièrement légitime de s’interroger sur le choix de ce thème. Le chapitre III révèle que cette pratique de la dissimulation se retrouve également au niveau du narrateur qui louvoie entre la nécessité de raconter, le silence et le mensonge, mais qui, toujours, insiste sur la dissimulation. Cette thématique contamine le genre même des textes qui se cachent derrière toutes les œuvres à la mode au XIIe siècle, brouillant ainsi leur identité dans de multiples échos. La dissimulation est donc partout et, définitivement, pousse à s’interroger sur l’identité. Finalement, en attirant de la sorte l’attention sur l’identité, Hue de Rotelande a sans doute voulu faire passer un message à son auditoire. Le chapitre IV montre que les romans s’adressaient clairement au public anglo-normand des Marches galloises et qu’une lecture politique y était dissimulée. Hue de Rotelande critiquerait le pouvoir royal d’Henri II, souvent en opposition à ses barons, et flatterait la conscience identitaire d’un groupe, celui des Cambro-normands.