Takmilat al ʿUyūn d'al-Is̥fahānī et ses sources : une histoire des méthodes algorithmiques de résolution des équations cubiques
Auteur / Autrice : | Nacera Bensaou |
Direction : | Pascal Crozet |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Philosophie, épistémologie. Histoire des mathématiques |
Date : | Soutenance le 09/07/2018 |
Etablissement(s) : | Sorbonne Paris Cité |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Savoirs scientifiques : Epistémologie, histoire des sciences, didactique des disciplines (Paris ; 2000-2019) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Laboratoire Sciences philosophie histoire (Paris ; 2009-....) |
établissement de préparation : Université Paris Diderot - Paris 7 (1970-2019) | |
Jury : | Président / Présidente : Karine Chemla |
Examinateurs / Examinatrices : Pascal Crozet, Karine Chemla, Philippe Abgrall, Dominique Tournès, Erwan Penchèvre, Ahcène Tlilani | |
Rapporteur / Rapporteuse : Philippe Abgrall, Dominique Tournès |
Mots clés
Résumé
En 1824, un mathématicien et astronome Iranien, ‘Alī Muḥammad ibn Muḥammad Ḥusayn al-Iṣfahānī, propose une nouvelle théorie des équations cubiques, dans un traité intitulé ''Takmilat al-'Uyūn''. Écrit en langue arabe dans un style ancien, sans symbolisme mathématique, ce traité est exclusivement consacré à la résolution des équations cubiques pour lesquelles il ne met en œuvre que des algorithmes numériques. Ce traité emprunte quelques algorithmes aux mathématiques de ses prédécesseurs comme Sharaf al-Dīn al-Ṭūsī, al-Kāshī ou al-Yazdī. Al-Iṣfahānī résout l'ensemble des vingt-cinq équations cubiques en utilisant les formules classiques connues depuis al-Khawārizmī pour toutes les équations du premier et second degré et celles du troisième degré réductibles au second degré. Il applique, sans se l'approprier, l'algorithme d'extraction de la racine chiffre par chiffre utilisé par Sharaf al-Dīn al-Ṭūsī, et plus tard par al-Yazdī, à l'ensemble des équations cubiques non réductibles au second degré mais qui ne contiennent pas le cube et le nombre dans un même membre de l'équation. Aux cinq équations qu’al-Ṭūsī résout par des méthodes analytiques de géométrie algébrique, celles qui contiennent le cube et le nombre dans un même membre de l'équation, il apporte un ensemble d'algorithmes tous basés sur l'idée d'une solution approchée initiale améliorée par le calcul itératif des termes d'une suite convergente. L'une de ces méthodes, fondée sur l'idée du calcul d'un point fixe d'une fonction, est déjà présente dans le traité d'al- Kāshī qui résout un ancien problème des mathématiques grecques: le calcul du sinus 1°. Une autre de ces méthodes résout ce type d'équations par une réduction de l'intervalle de la racine, et une troisième catégorie de méthode combine l'extraction de la racine chiffre par chiffre avec la réduction de l'intervalle. Le point commun entre ces algorithmes itératifs est que le nombre d'itérations ne peut pas être connu à priori, comme cela était possible dans l'algorithme d'extraction de la racine chiffre par chiffre. C'est visiblement la raison pour laquelle al-Iṣfahānī utilise l’expression de méthodes par 'Istiqrā' pour qualifier cette itération indéterminée : l'algorithme s'arrête lorsque la différence entre deux calculs successifs devient infiniment petite. Tout en se rattachant à la tradition des arithméticiens algébristes mais aussi à la tradition d'al-Khayyām/al-Ṭūsī, le traité d’al-Iṣfahānī constitue une contribution originale à la théorie des équations cubiques par l'analyse numérique. Un point remarquable dans ce traité doit être souligné: al-Iṣfahānī propose pour ces algorithmes plusieurs versions qui se distinguent entre elles par la complexité des calculs qu'il signale explicitement et qu'il montre à travers des exemples qu'il compare vis-à-vis de la quantité des calculs. L'objectif de cette thèse n'est nullement celui d'écrire l'histoire générale des équations cubiques dans les mathématiques arabes, mais partant de l'édition critique de Takmilat al 'Uyūn, d'étudier d'une part les algorithmes d’al-Iṣfahānī et d'autre part d'analyser les traditions mathématiques dans lesquelles il s'inscrit.