Ethnographie des conflits domestiques en Kabylie : injures, commérages, malédictions
Auteur / Autrice : | Samia Khichane |
Direction : | Cécile Leguy |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Anthropologie |
Date : | Soutenance le 05/12/2018 |
Etablissement(s) : | Sorbonne Paris Cité |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Langage et langues (Paris) |
Partenaire(s) de recherche : | établissement de préparation : Université de la Sorbonne Nouvelle (Paris ; 1970-....) |
Laboratoire : Laboratoire des langues et civilisations à tradition orale (Villejuif, Val-de-Marne) | |
Jury : | Président / Présidente : Marie-Luce Gélard |
Examinateurs / Examinatrices : Cécile Leguy, Marie-Luce Gélard, Souad Azizi, Mena Lafkioui, Tassadit Yacine | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Souad Azizi, Mena Lafkioui |
Mots clés
Résumé
En Kabylie, société de tradition patriarcale à domination masculine, les femmes ont recouru pendant des siècles à une multitude de pratiques détournées, décrites dans la littérature comme des « contre-pouvoirs » (Lacoste-Dujardin, 1985, 2008). À travers nombre de processus, elles semblent avoir de tout temps défié l’autorité dominante par le recours à des pratiques magiques, par une adaptation aux normes et valeurs de la société, mais surtout par la subtilité et la maîtrise de l’art de la parole. L’injure féminine, en tant qu’acte de langage, fait également partie des stratégies qu’utilisent les femmes kabyles afin d’exercer leur pouvoir de manière indirecte sur la société dominante, autrement dit, sur les hommes.La plupart des recherches qui se sont penchées sur la question de l’injure en Kabylie ont été menées par des anthropologues qui l’abordent dans son aspect ritualisé (Aït-Ferroukh, 1999 ; Rabia, 1988) ou par des linguistes dont les réflexions portent essentiellement sur le critère sémantique envisagé en rapport avec la vision du monde et la société (Mebtouche-Nejai 2012). Dans la perspective anthropologique qui m’intéresse, l’injure sera appréhendée comme un ensemble d’actes sociaux porteurs de conséquences (Laforêt et Vincent, 2004), plutôt que comme une catégorie de parole dépréciative, d’où la nécessité de prendre en compte sa valeur pragmatique dans la dimension du tort causé ou subi ou effet injure (Larguèche 1983, 1993, 2004, 2009) qui est nécessaire à sa compréhension.En m’appuyant sur les spécificités typologiques de l’injure féminine, je tenterai de montrer, dans une optique essentiellement pragmatique, comment dans une société à domination masculine où la parole est codifiée, l’injure, en tant que transgression langagière, permet aux femmes d’exercer leur pouvoir de manière indirecte. L’examen de ces procédés permettra de cerner les enjeux du pouvoir féminin et de voir dans quelle mesure l’injure peut être utilisée comme contre-pouvoir.