Poétique du temps dans les tragédies de Sophocle : la construction de l'effet tragique
Auteur / Autrice : | Patricia Godard |
Direction : | Michel Fartzoff |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Langues et littératures anciennes |
Date : | Soutenance le 19/12/2018 |
Etablissement(s) : | Bourgogne Franche-Comté |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sociétés, Espaces, Pratiques, Temps (Dijon ; Besançon ; 2017-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Institut des sciences et techniques de l'Antiquité (Besançon) - Institut des Sciences et Techniques de l'Antiquité - UFC (EA 4011) / ISTA |
Jury : | Président / Présidente : Paul Demont |
Examinateurs / Examinatrices : Michel Fartzoff, Paul Demont, Christine Mauduit, Marie-Pierre Noël, Suzanne Saïd | |
Rapporteur / Rapporteuse : Christine Mauduit, Marie-Pierre Noël |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Mots clés libres
Résumé
Par nature, le théâtre a partie liée avec le temps. Dans les sept pièces conservées de Sophocle, χρόνος est au cœur du discours des personnages, comme sujet de leur réflexion sur l’existence, mais aussi comme agent de la progression du drame. Au premier niveau, son action est destructrice, car l’homme de Sophocle, « homme d’un jour » (Aj.399 et Ant. 790), éprouve durement sa nature brutale, faite de revirements arbitraires, auxquels il résiste autant qu’il peut, à moins qu’il ne s’en joue. Mais au second niveau, celui de la dynamique de l’action, le temps est aussi constructeur de l’effet tragique. En atteste le lexique, important et varié, capable de rendre visible la fatalité en marche au sein de la tragédie. Ainsi, le temps, non représentable puisqu’il échappe à la mimèsis, peut servir de révélateur à la tension latente, qu’on appelle communément le tragique, concept flou et jamais véritablement défini par les textes, et qui va trouver ici une consistance poétique et une définition nouvelle dans l’observation des choix d’écriture du dramaturge. Ce faisant, c’est la démarche créatrice de Sophocle que l’on interroge. L’analyse du vocabulaire dans des passages choisis dément sa réputation d’auteur peu spectaculaire : retard, hâte, revirements, hasard, opportunité…sont mis en valeur au cœur des vers comme des indicateurs majeurs de la marche du drame vers sa fin. Et si l’on croise ensuite les données lexicales avec les marques de l’énonciation et les éléments des rites civiques qui affleurent dans les textes, on distingue alors la concaténation assurant la cohésion des ensembles et forgeant la temporalité propre à chaque pièce. Du rapport contraint entre le temps dramatique et le temps scénique, Sophocle a tiré des effets originaux qui forment sa poétique. Comme l’aède-démiurge d’Homère, le dramaturge construit ses tragédies en charpentier de l’effet tragique. Il fabrique un présent dramatique parsemé de signes indiciels marquant le passage de χρόνος. Ce présent, troublé par le passé qui s’y déploie encore, est celui de l’inadaptation du héros, tout à la fois temps de l’urgence, du retard, de l’immobilité qu’il faut conjurer pour que la perspective d’un futur puisse prendre forme. La tragédie sophocléenne s’avère finalement très consciente d’elle-même, développant un langage performatif qui entraîne à l’action, disant le rapport sensible de l’homme au temps et tout à la fois sa propre relation au temps qui la compose.MOTS-CLÉS : tragédie-effet tragique-deixis-temps-temporalité