Thèse soutenue

Les archives bilingues de Totoès et de Tatéhathyris

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Auteur / Autrice : Lorenzo Uggetti
Direction : Michel Chauveau
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences de l'antiquité : histoire, archéologie, langues et littératures
Date : Soutenance le 10/02/2018
Etablissement(s) : Paris Sciences et Lettres (ComUE)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de l'École pratique des hautes études (Paris)
Partenaire(s) de recherche : Établissement de préparation de la thèse : École pratique des hautes études (Paris ; 1868-....)
Laboratoire : Archéologie et philologie d'Orient et d'Occident (Paris ; 1998-....)
Jury : Président / Présidente : Jean-Luc Fournet
Examinateurs / Examinatrices : Michel Chauveau, Jean-Luc Fournet, Mark Depauw, Paolo Gallo
Rapporteurs / Rapporteuses : Jean-Luc Fournet, Philippe Collombert

Mots clés

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Résumé

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Dans les ruines d'une maison proche du temple ptolémaïque de Deir al-Medina, sur la rive gauche de Thèbes, la Mission Archéologique Italienne dirigée par Ernesto Schiaparelli découvrit en février 1905 deux jarres encore scellées, desquelles on retira 33 rouleaux. Ils décelèrent 44 papyrus en écriture démotique, 8 en grec et 4 bilingues ; de plus, parmi les bandelettes de lin qui les enveloppaient, 5 étaient inscrites. Au total, 61 documents constituaient les archives familiales d'un prêtre attaché à ce temple, nommé Totoès fils de Zmanrès, et de son épouse Tatéhathyris. Le lot complet fut envoyé au Musée Égyptien de Turin, dont Schiaparelli était le directeur. Les textes grecs furent publiés en 1929, alors que l'édition des papyrus démotiques ne vit le jour qu'en 1967. Six d'entre eux furent republiés entre 1978 et 1985, tandis que quatre autres furent examinés à nouveau en 1997 dans une étude sur l'affermage à l'époque ptolémaïque. La plupart des documents sont des actes légaux et comportent donc des protocoles de datation mentionnant les différents souverains qui ont régné en Haute Égypte tout au long du IIe siècle avant notre ère. Le plus ancien, daté de 194, compte parmi les rares attestations du pharaon rebelle Chaonnophris ; les trois plus récents, datés entre 101 et 100, non seulement sont les premiers à révéler le décès de Cléopâtre III, mais sont aussi les seuls à témoigner de la corégence de Ptolémée X Alexandre Ier, de sa femme Cléopâtre Bérénice III, et de l'héritier Alexandre II, le futur Ptolémée XI. Les contrats sont de nature très variée. La plupart concernent la vente ou la location de jours de service liturgique, qui donnaient droit à une part proportionnelle des revenus des différents temples de la rive gauche thébaine. Ils représentaient une partie importante du patrimoine de ces prêtres : une donation issue de ces archives montre en effet qu'ils pouvaient être transmis de père en fils. D'autres actes mentionnent l'affermage de champs, l'achat d'immeubles, le prêt de céréales ou d'argent ; deux documents se rapportent à une forme de bail difficile à déchiffrer, un autre à un échange d'animaux. Le droit de la famille est représenté par cinq contrats de mariage et un de divorce ; un dernier fait état de frais d'enterrement. La thèse a pour objet la réédition intégrale de ces documents, y compris les jarres qui les contenaient. L'accès direct aux papyrus originaux conservés à Turin, ainsi qu'aux archives de leur mise au jour et de leur publication, a permis de détecter deux fragments inédits, de retrouver les numéros d'inventaire des papyrus grecs, de reconstituer les circonstances exactes de leur découverte et de retracer les rouleaux d'origine, pour la plupart des textes. L'étude philologique a établi des correspondances entre démotique et grec pour de nombreux noms de personnes et de lieux, a amélioré la lecture et mené à une nouvelle interprétation de certains textes. Deux actes et deux serments ont notamment révélé la dévolution des fonctions de mandataire de la déesse Hathor d'un père à ses trois fils, avec le consentement du clergé du temple de Deir al-Medina. Les modalités de partage de l'héritage paternel entre Tatéhathyris et son frère Pikos, où Totoès a joué un rôle d'intermédiaire, ont également été mieux saisies. Une étude paléographique menée, pour la première fois, sur l'ensemble du corpus a conduit à reconnaître la main de certains scribes auxquels ont été attribués certains papyrus, tandis que d'autres textes ont été réassignés. L'analyse des protocoles a dévoilé également une pratique locale visant à les raccourcir de manière arbitraire. Enfin, l'analyse des données prosopographiques et topographiques a mené à dresser un arbre généalogique de plusieurs générations de la famille de Totoès et de Tatéhathyris, ainsi qu'un portrait plus fidèle tantôt de la population, tantôt de lieux de culte, terrains et bâtiments de la ville de Djémê, les Memnoneïa grecs.