Inférence circulaire dynamique en population générale et dans le spectre psychotique : apports de la prise de décision perceptive
Auteur / Autrice : | Pantelis Leptourgos |
Direction : | Sophie Denève, Renaud Jardri |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Neurosciences et sciences cognitives |
Date : | Soutenance le 14/11/2018 |
Etablissement(s) : | Paris Sciences et Lettres (ComUE) |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Cerveau, cognition, comportement (Paris ; 1992-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Laboratoire de neurosciences cognitives & computationnelles (Paris) |
établissement de préparation de la thèse : École normale supérieure (Paris ; 1985-....) | |
Jury : | Président / Présidente : Pascal Mamassian |
Examinateurs / Examinatrices : Sophie Denève, Renaud Jardri, Pascal Mamassian, Peggy Seriès, Philip Corlett, Stephan Enno Klaas | |
Rapporteur / Rapporteuse : Peggy Seriès, Philip Corlett |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
Nous évoluons dans un monde incertain. De ce fait, notre survie dépend de notre capacité à prendre rapidement des décisions, et ce de manière fiable et adaptative. Il est possible de mieux comprendre cette capacité en considérant la perception comme un processus d’inférence probabiliste au cours duquel les informations sensorielles sont combinées à nos attentes pour produire une interprétation plausible de notre environnement. Les théories récentes de psychiatrie computationnelle suggèrent par ailleurs que la grande variabilité des troubles psychiatriques, au rang desquelles figure la schizophrénie, pourrait résulter d’une altération de ces mêmes processifs prédictifs. L’Inférence Circulaire est l’une de ces théories. Ce cadre de pensée stipule qu’une propagation incontrôlée d’information dans la hiérarchie corticale pourrait générer des percepts ou des croyances aberrantes. Afin d’explorer le rôle joué par l’Inférence Circulaire en condition normale ou pathologique, ce travail de thèse s’est appuyé sur des tâches de prise de décision en conditions perceptives ambigües. Dans une première partie, nous nous sommes intéressés au rôle joué par la circularité dans la perception bistable. Le phénomène de bistabilité survient lorsque deux interprétations se succèdent à intervalle régulier pour un même percept. Nous présentons les résultats d’une tâche conduite en population saine où nous avons manipulé les informations sensorielles et à priori utilisées par les participants lors de la visualisation d’un cube de Necker (article 1). Nous avons pu montrer un effet propre à chaque manipulation, mais également une interaction entre ces deux sources d’information, incompatible avec une intégration Bayésienne optimale. Résultat confirmé par la comparaison de divers modèles computationnels ajustés aux données, qui a pu mettre en évidence la supériorité de l’Inférence Circulaire sur les modèles Bayésiens classiques. Nous avons ensuite voulu tester un modèle fonctionnel de la bistabilité (article 2). Nous avons donc dérivé la dynamique du modèle et montré que la présence de boucles descendantes dans la hiérarchie corticale, transformait ce qui était jusque là un intégrateur imparfait du bruit sensoriel en modèle à attracteur bistable. Ce modèle ne reproduit pas seulement le phénomène de bistabilité, mais également l’ensemble de ces caractéristiques phénoménologiques. Dans un 3ème article, nous avons testé une prédiction, notamment en cas de présentation discontinue d’un stimulus bistable. Deux expériences complémentaires utilisant un paradigme de présentation intermittente du cube de Necker ont donc été conduites en population générale. Nos résultats étaient compatible avec les prédictions faites par le modèle de l’Inférence Circulaire Dynamique, suggérant que la circularité puisse être un mécanisme générique à l’origine de notre façon de voir le monde. Dans la seconde partie de ce travail, nous avons étudié l’Inférence Circulaire en condition pathologique, notamment lors d’expériences psychotiques (schizophrénie, psychédéliques). Nous avons utilisé la perception bistable pour explorer les mécanismes computationnels à l’œuvre dans la schizophrénie (article 4,5). Nous avons comparé les performances de patients présentant des symptômes psychotiques à des témoins sains appariés lors d’une tâche de perception bistable. Nous avons pu montrer chez les patients une amplification des informations sensorielles combinée à une surestimation de la volatilité environnementale. Enfin nous terminons ce travail en proposant une approche transversale de l’effet des psychédéliques (article 6), sur la base des résultats précédents et de la spécificité clinique de ces expériences sensorielles cross-modales, afin de relier l’échelle macroscopique (i.e., comportement et phénoménologie), mésoscopique (i.e., les boucles inférentielles) et microscopique (i.e., les différents neurotransmetteurs impliqués aboutissant à un microcircuit canonique).