Épiphanies du visible : la vision dans le discours mystique français (1620-1630)
Auteur / Autrice : | Stéphane Cabrol |
Direction : | Christian Belin |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | LITTERATURES FRANCAISES, COMPAREES spécialité Littérature française |
Date : | Soutenance le 08/12/2018 |
Etablissement(s) : | Montpellier 3 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Langues, Littératures, Cultures, Civilisations (Montpellier ; 1991-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Institut de recherche sur la Renaissance, l'âge classique et les Lumières (Montpellier) |
Jury : | Président / Présidente : Benedetta Papasogli |
Examinateurs / Examinatrices : Christian Belin, Olivier Leplatre | |
Rapporteur / Rapporteuse : Laurence Plazenet |
Mots clés
Résumé
L’homme peut-il voir Dieu ? La question, à laquelle de nombreux théologiens chrétiens ont tenté de répondre, est à l’arrière-plan des Divins Élancements d’amour exprimés en cent Cantiques faits en l’honneur de la Très-Sainte-Trinité (1628) de Claude Hopil. Le poète y célèbre le mystère de la Trinité et clame son désir de la voir, sans jamais oublier que les Écritures enseignent que Dieu est invisible. À la même question, Pierre de Bérulle apporte dans les Discours de l’état et des grandeurs de Jésus (1623) une réponse liée au mystère sur lequel porte sa méditation : grâce à l’Incarnation, Dieu s’est manifesté dans la création et, partant, s’est rendu visible.Le présent travail s’est attaché à évaluer les implications théologiques, spirituelles et culturelles que recouvrait le thème de la vision dans chacune des deux œuvres et à déterminer dans quelle mesure les auteurs étaient influencés par les nouveautés scientifiques de leur époque. Bérulle et Hopil sont héritiers de ce qu’il est convenu d’appeler le modèle visuel de la connaissance, que saint Augustin a exposé dans plusieurs de ses ouvrages, et leurs savoirs dans le domaine de l’optique ressortissent surtout à des conceptions pré-classiques, antérieures aux travaux de Kepler et de Descartes. Hopil connaît les deux théories héritées de l’Antiquité qui avaient encore cours au début du XVIIe siècle, celle de l’émission et celle de la réception, mais il semble qu’aucune ne corresponde à la vision telle qu’il l’entend dans la plupart de ses poèmes. Celle-ci est présentée comme l’expérience, instable et ineffable, d’une coprésence de la créature et du Créateur.Si le domaine de l’optique ne retient pas particulièrement l’attention de Bérulle, les connaissances qu’il a acquises dans celui de l’astronomie lui permettent de concevoir une mystique du regard. Son œuvre a été publiée au cours d’une décennie qui suit de peu les travaux de Galilée et de Kepler, indissociables de la promotion du système cosmologique copernicien. Pour Bérulle, le chrétien doit regarder le Christ et il compare ce regard à celui que les astronomes antiques, tels qu’il les imagine, portaient sur le soleil. En outre, le Christ est d’autant mieux vu qu’il occupe dans la vie spirituelle une place centrale analogue à celle du soleil dans l’univers, selon la théorie que Copernic a proposée en son temps et à laquelle l’Oratorien fait référence. Quelle que soit l’importance que Bérulle accorde aux données venues de l’astronomie, il les remodèle pour servir son objectif principal : glorifier l’Incarnation.