Thèse soutenue

Pierre Bayle et le Dictionnaire historique et critique : scepticisme moderne et historiographie polémique
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Auteur / Autrice : Eva Rothenberger
Direction : Alain GénetiotRotraud von Kulessa
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Langues, Littératures et Civilisations
Date : Soutenance le 21/06/2018
Etablissement(s) : Université de Lorraine en cotutelle avec Universität Augsburg
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale SLTC - Sociétés, Langages, Temps, Connaissances (Lorraine)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Littératures, Imaginaire, Sociétés (Nancy)
Jury : Président / Présidente : Emmanuel Bury
Examinateurs / Examinatrices : Alain Génetiot, Rotraud von Kulessa, Susanne Greilich, Sabine Schwarze, Alain Muzelle
Rapporteurs / Rapporteuses : Emmanuel Bury, Susanne Greilich

Résumé

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Le but de cette thèse en cotutelle entre l‘Université d‘Augsbourg et l‘Université de Lorraine (Nancy) est de démontrer comment Pierre Bayle, le philosophe de Rotterdam, profite des traits caractéristiques de son Dictionnaire historique et critique. Le dictionnaire, en tant que genre littéraire, permet à l’auteur de réaliser différents buts intellectuels et moraux. Bayle a ainsi l’occasion à la fois de propager son attitude de sceptique moderne et de poursuivre son travail d’historiographe fiable et polémique.Dans un premier temps, on problématise ce qu’est un dictionnaire à l’époque de Bayle, à savoir au 17e siècle. Afin de mieux apprécier la valeur du Dictionnaire historique et critique de Bayle parmi les ouvrages de la même époque, les brèves présentations des dictionnaires précédents et contemporains de l’auteur permettent de faire le panorama de ce genre littéraire. À ce travail préliminaire se joint la description systématique des particularités du Dictionnaire de Bayle. Cette démarche contribue à faire ressortir la boîte à outils dont il se sert au gré de ses besoins afin de donner une forme appropriée à sa pensée.Dans un deuxième temps, il s’agit de démontrer comment ces traits caractéristiques contribuent à mettre en scène la pensée sceptique de Pierre Bayle. Par le biais d’une brève description du pyrrhonisme qui date de l’Antiquité grecque, il est possible de montrer quels éléments du scepticisme pyrrhonien ont perduré au temps moderne, jusqu’à quel point Bayle s’insère dans cette tradition philosophique et à partir de quel moment il la transforme en une version moderne. L’analyse détaillée d’un choix d’articles du Dictionnaire historique et critique fait ensuite ressortir une structure sceptique de l’enchaînement des arguments. Il existe alors une corrélation entre la structure et le contenu, entre le fond et la forme. Le résultat en est que la composition de l’ouvrage en articles et en remarques permet à Bayle de reprendre les fils thématiques à plusieurs endroits sans qu’il doit nécessairement pousser les réflexions à des conclusions définitives. Il laisse ainsi de nombreuses discussions en suspens et force ainsi son lecteur à élaborer ses propres réflexions. De surcroît, Bayle s’engage pour la tolérance en relativisant différents points de vue afin de montrer l’égalité de leurs forces. Son but est de favoriser la diversification des opinions et l’ouverture d’esprit de ses lecteurs, en démontrant que certains sujets ne peuvent se réduire à une opinion définitive.Outre cette structure argumentative qui provoque l’ouverture, il y a une autre forme de structuration qui tend à réaliser l’effet inverse, à savoir la version définitive des choses, ce qui est étudié dans un troisième et dernier temps. Ce concept s’oppose nettement à l’idée de l’ouverture. Il est possible de démontrer que la même forme du Dictionnaire peut être utilisée dans une finalité bien opposée à ce qu’on a vu dans le chapitre précédent. En tant qu’historien, c’est l’exactitude et l’impartialité de la documentation des faits historiques auxquelles Bayle s’attache. Lors de cette démarche, il essaie de réconcilier les sources parfois contradictoires – relatives à un même événement historique – afin de parvenir à une seule version fiable de l’histoire. Sa méthode se donne pour but de travailler à une historiographie valable et impartiale à la base de l'examen critique des sources primaires. Le choix des citations, la façon de les enchaîner ainsi que les ruses rhétoriques produisent d'abord l’impression d’une historiographie neutre. Mais en analysant en détail le texte baylien, on découvre qu'il peint une image particulière de certains événements et personnages historiques. Certes, en réunissant de nombreux aspects concernant un sujet dans ce contexte, Bayle compare diverses sources, détecte des erreurs et des falsifications et en déduit à la fin la version nécessairement logique d’un événement historique