Thèse soutenue

La voix passionnée : force expressive et affections sociales dans l'"Essai sur l'origine des langues" de Rousseau

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Auteur / Autrice : Francesco Boccolari
Direction : Céline SpectorPaolo Virno
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Philosophie
Date : Soutenance le 19/10/2018
Etablissement(s) : Bordeaux 3 en cotutelle avec Università degli studi Roma Tre
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Montaigne-Humanités (Pessac, Gironde ; 2007-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Sciences, Philosophie, Humanités (Bordeaux)
Etablissement d'accueil : Università degli studi Roma Tre
Jury : Président / Présidente : Gabrielle Radica
Examinateurs / Examinatrices : Paolo Virno, Gabriella Silvestrini, Marco Menin, Bruno Bernardi
Rapporteurs / Rapporteuses : Luigi Perissinotto, Marco Mazzeo

Résumé

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Cette recherche combine des éléments qui appartiennent à l'histoire de la philosophie, à la philosophie politique et à la philosophie du langage. Son objet est d’observer et de recomposer certaines des étapes qui marquent, dans la philosophie de Rousseau, l’émergence progressive et radicale du langage en tant que facteur politique. Plus précisément, elle fournit une étude de la conception pragmatique du langage qui sous-tend la thèse principale de l’Essai sur l’origine des langues, selon laquelle la parole ne tire pas son origine des besoins physiques mais des passions considérées comme « besoins moraux ». Rousseau estime que contrairement aux besoins physiques, inéluctablement ressentis par les hommes indépendamment de l’éventualité et des circonstances de leur rencontre, les passions ne s’animent jamais « tant qu’elles sont de nul effet » (Emile, II, OC IV, Pléiade, p. 321), à savoir tant qu’elles ne sont pas en mesure d’agir l’une sur l’autre à l’intérieur d’une relation dont elles constituent les pôles. Or précisément parce qu’il pense que la parole, à son origine, a été occasionnée par ce type d’affections qui se développent dans l’âme humaine en produisant leurs effets à l’intérieur des relations, il considère également que son rôle primitif n’a pas consisté à représenter un contenu préconstitué par rapport à sa matérialisation phonique, mais à exercer une force immanente à l’expression sonore du sentiment. En ce sens, la tâche que s’assigne Rousseau dans l’Essai sur l’origine des langues est de rendre compte des facteurs qui ont permis à la langue de se rendre porteuse, dans un moment chronologiquement et logiquement secondaire de son histoire, de significations générales et abstraites de toute attitude émotive inhérente à l’acte d’énonciation du sujet. Le grand intérêt de cette explication consiste à attribuer l’éclosion et le progrès de la dimension représentative du langage à une modification de sa fonction sociale et politique, une modification qui consiste dans la suppression graduelle de la nécessité d’exercer par la parole une action morale sur autrui, d’exciter et de calmer les passions par les sonorités du discours, d’agir avec force dans le langage et d’influer par là-même sur la société.