Thèse soutenue

L’art de la découpe à table : trajectoires 1700 - 2017

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Auteur / Autrice : Gil Galasso
Direction : Christophe Bouneau
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Histoire moderne et contemporaine
Date : Soutenance le 11/09/2018
Etablissement(s) : Bordeaux 3
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Montaigne-Humanités (Pessac, Gironde ; 2007-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre d'études des mondes moderne et contemporain (Pessac, Gironde)
Jury : Président / Présidente : Christine Bouneau
Examinateurs / Examinatrices : Jean-Pierre Poulain, Jean-Pierre Williot, Anne-Marie Granet-Abisset, Philippe Meyzie
Rapporteurs / Rapporteuses : Jean-Pierre Poulain, Jean-Pierre Williot

Résumé

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La découpe de viandes et le filetage de poisson, destinés aux rois et aux nobles dans les siècles passés et, plus récemment, aux clients de la restauration traditionnelle, font partie de l’histoire de la gastronomie, au même titre que l’histoire de la cuisine. Ces pratiques, considérées comme une technique ou une science, voire, par certains, comme un art, bien que déjà présentes sous une forme ritualisée dans bien des textes mythologiques et des légendes fondatrices, ont connu plusieurs évolutions historiques. Dès le Moyen Âge, la pratique de la découpe des viandes et poissons auprès des élites s’est éloignée des techniques de la boucherie pour revêtir une dimension artistique. À partir de la Renaissance et jusqu’au XVIIIème siècle, les volailles et autres viandes sont filetées par les écuyers tranchants, véritables spécialistes qui effectuent des gestes empreints d’élégance, tel celui qui consiste à découper les viandes à la volée, maintenues en l’air en haut d’une fourchette. À partir du XVIIIème siècle, la découpe doit s’adapter aux changements sociaux : à la fin de l’Ancien Régime, en France, elle connaît une première grande évolution à la suite de changements radicaux dans la manière de concevoir la cuisine, puis avec l’apparition du service à la russe et la mise en valeur des rôts (pièces rôties) au centre du repas, évolution bientôt suivie par d’autres, en grande partie influencées par Marie-Antoine Carême puis Urbain Dubois et Emile Bernard. Plusieurs transformations sociales, culturelles et professionnelles auront aussi leur importance : la popularisation des sports d’hiver va marquer le déclin du poste de maître d’hôtel ; la loi Godart (juillet 1933) relative au contrôle et à la répartition des pourboires, va cristalliser le fameux conflit cuisine-salle ; par ailleurs, les « commandements de la nouvelle cuisine » prônés par Christian Millau et Henri Gault (1973) imposent la généralisation du service à l’assiette et rendent l’ancienne science du maître d’hôtel obsolète. Mais les pratiques de la découpe sont également présentes dans le foyer familial. De nombreux écrits sur les usages domestiques décrivent la manière de fileter viandes et poissons. Les pères de famille, dits amphitryons, possèdent et transmettent ce savoir-faire à l’occasion des réunions familiales. Traditionnellement, si la mère de famille officie en cuisine, le père de famille gère, en plus des boissons, les découpes de volailles et gigots. Mais, depuis la moitié du XXème siècle, ces usages sont en déclin. Malgré tout, l’art de la découpe a survécu sous forme de technique, dans certains restaurants et dans les écoles hôtelières, où il fait l’objet de débats houleux entre enseignants et professionnels, qui rejouent, à leur manière, la querelle des Anciens et des Modernes. La restauration française, actuellement en difficulté et en recherche de repères, a sans doute beaucoup à gagner de ces travaux sur les découpes et filetages devant les clients. En ce début du XXIème siècle, elle peut y retrouver une authenticité ancrée sur des racines profondes.