Bases cognitives de l'apprentissage stratégique lors d'interactions sociales répétées : des neurosciences cognitives à l'économie comportementale
Auteur / Autrice : | Thibaud Griessinger |
Direction : | Giorgio Coricelli, Mehdi Khamassi |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sciences cognitives option Neurosciences computationnelles |
Date : | Soutenance le 18/12/2017 |
Etablissement(s) : | Paris Sciences et Lettres (ComUE) |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Cerveau, cognition, comportement (Paris ; 1992-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Laboratoire de neurosciences cognitives & computationnelles (Paris) |
Établissement de préparation de la thèse : École normale supérieure (Paris ; 1985-....) | |
Jury : | Président / Présidente : Tiziana Zalla |
Examinateurs / Examinatrices : Giorgio Coricelli, Mehdi Khamassi, Tiziana Zalla, Christian Carl Ruff, Giuseppe Attanasi, Andrea Brovelli | |
Rapporteur / Rapporteuse : Christian Carl Ruff, Giuseppe Attanasi |
Mots clés
Résumé
Les interactions sociales humaines reposent sur notre capacité à apprendre et à ajuster nos comportements en réponse à ceux d'autrui. Les jeux stratégiques offrent un cadre pertinent pour étudier les processus cognitifs sous-tendant la représentation des intentions d'autrui, ainsi que les actions adaptées par lesquelles ces intentions se traduisent. Ces dernières décennies, le champ de l'économie comportementale a montré que les comportements humains dévient quasi systématiquement des prescriptions d’optimalité (équilibre) formulées par la théorie des jeux. Sur la base de récentes avancées en sciences cognitives, nous avons proposé que l’étude des sources de variation comportementale entre les individus pourrait fournir des informations cruciales à notre compréhension des limites de l’apprentissage social humain, et nous permettre de mieux comprendre cette non-convergence vers des interactions mutuellement bénéfiques. Dans ce travail de thèse, nous avons combiné des outils computationnels issus des neurosciences cognitives au cadre formel de l’économie comportementale dans le but d’étudier la façon dont les humains diffèrent dans leur compréhension du comportement d’autrui au cours d’interactions stratégiques compétitives. Dans un premier temps, nous avons abordé la question de l’interaction entre l’environnement de jeu et l’hétérogénéité de l’apprentissage stratégique. Nos résultats ont montré que, lors d’une interaction compétitive répétée, la structure (règle) du jeu peut influencer le niveau d’engagement dans un mode d’apprentissage stratégique sophistiqué et expliquer les déviations par rapport à l’équilibre. Nos données suggèrent que les participants occupant une position désavantageuse dans l’interaction stratégique sont contraints par la sophistication de leur apprentissage. Leurs opposants, bien qu’avantagés, doivent tout de même s’engager dans un apprentissage stratégique sophistiqué pour adapter leur comportement et maximiser leurs gains. Cette étude a ainsi révélé pour la première fois l’impact des différences interindividuelles dans l’apprentissage stratégique sur les déviations des décisions par rapport à l’optimalité et éclaire les processus responsables de l’émergence de dynamiques de choix leader-follower. De plus, nos résultats suggèrent qu’une analyse coût-bénéfice pourrait sous-tendre l’engagement des joueurs stratégiques dans des processus d’apprentissage plus sophistiqués. Dans un second temps, nous avons testé l’hypothèse selon laquelle la profondeur (le niveau de sophistication) de l’apprentissage stratégique n’est pas le seul facteur permettant la compréhension des intentions d’autrui au cours d’une interaction stratégique, mais que cette compréhension repose également sur la capacité à détecter et exploiter des patterns dans son comportement. Nous avons observé que les participants étaient capables de détecter des régularités statistiques dans le comportement de l’opposant, mais également que cette aptitude n’était pas corrélée à un engagement plus faible dans un apprentissage stratégique sophistiqué, suggérant ainsi que les humains peuvent combiner des informations provenant de deux types d’apprentissage pour améliorer la précision de leurs croyances vis-à-vis d’autrui au cours de prises de décision sociales.