Théorie de la niche : nouvelles perspectives sur l'adaptation des plantes et le fonctionnement des écosystèmes
Auteur / Autrice : | Thomas Koffel |
Direction : | Tanguy Daufresne |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Ecologie fonctionnelle |
Date : | Soutenance le 19/10/2017 |
Etablissement(s) : | Montpellier, SupAgro |
Ecole(s) doctorale(s) : | École Doctorale GAIA Biodiversité, agriculture, alimentation, environnement, terre, eau (Montpellier ; 2015-...) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Écologie fonctionnelle et biogéochimie des sols et agrosystèmes (Montpellier) |
Jury : | Président / Présidente : Ophélie Ronce |
Examinateurs / Examinatrices : Tanguy Daufresne, Ophélie Ronce, Mathew Leibold, Elisa Thébault, Géza Meszéna, Nicolas Loeuille | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Mathew Leibold, Elisa Thébault |
Résumé
Les plantes, comme tous les êtres vivants, entretiennent un rapport double à leur environnement. L’environnement sélectionne quelles stratégies peuvent s’établir, et les stratégies ainsi sélectionnées façonnent en retour cet environnement. Cette boucle de rétroaction environnementale, lorsqu’elle est alimentée par une variabilité de formes, est le moteur de l’évolution, de l’assemblage des communautés et du développement écosystémique, et détermine en fin de compte les propriétés émergentes des écosystèmes.Les approches issues de l’écologie théorique reconnaissent depuis longtemps cette dualité, comme en témoignent les concepts de ''niche de besoin'' et ''niche d’impact'' au cœur de la théorie contemporaine de la niche. Similairement, les approches type « théorie des jeux » comme la dynamique adaptative reconnaissent le rôle central joué par la boucle de rétroaction environnementale en tant que moteur des dynamiques éco-évolutives.Dans cette thèse, j'unifie ces deux perspectives théoriques et les applique à des problèmes écologiques variés, dans le but de comprendre comment les interactions réciproques entre les plantes et leur environnement déterminent les traits adaptatifs des plantes et les propriétés émergentes des écosystèmes.Dans un premier temps, je propose un cadre mathématique général et rigoureux à la théorie contemporaine de la niche et la méthode graphique qui lui est associée. Après avoir étendu ce cadre à la prise en compte d’un continuum de stratégies en interaction à l’aide d’enveloppes géométriques, je montre comment appliquer la théorie contemporaine de la niche à deux perspectives, à savoir les dynamiques éco-évolutives et l’assemblage de communautés par remplacements successifs de stratégies.Dans un second temps, j’applique cette approche à l’étude de l’évolution des défenses des plantes contre les herbivores le long de gradients de nutriments, en considérant l’évolution des traits d’acquisition de la ressource, de tolérance et de résistance aux herbivores. Je montre que la prise en compte des transferts trophiques conduit à la sélection de stratégies compétitives mais sans défense dans les environnements pauvres, alors que ce sont toujours des stratégies défendues (résistantes, tolérantes, ou la coexistence des deux) qui dominent dans les environnements riches en nutriments. Mes résultats mettent en évidence le rôle central joué par la rétroaction plante-herbivores dans la détermination des patrons de défense des plantes.Dans un troisième temps, je montre comment la théorie contemporaine de la niche peut être étendue pour prendre en compte la facilitation. J’utilise ensuite cette approche pour montrer comment la colonisation d’un substrat nu par une communauté de plantes fixatrices d’azote couplée au recyclage des nutriments peut donner naissance à de la succession par facilitation. Contrairement aux modèles habituels de succession, je montre que la succession par facilitation donne lieu à un développement autogène de l’écosystème ainsi qu’un régime de bistabilité entre la végétation et le substrat nu en fin de succession. Enfin, je propose une nouvelle théorie de la succession basée sur les ratios de ressources.Pris dans leur ensemble, ces nouveaux développements démontrent que la théorie de la niche peut être adaptée à l’étude d’un large champ de situations écologiques, de la facilitation aux dynamiques éco-évolutives et à l’assemblage des communautés. Dans ce cadre conceptuel, mon approche basée sur les enveloppes s’avère être un outil efficace pour passer de l’échelle individuelle à l’échelle de l’écosystème, en assimilant le remplacement adaptatif d’espèces à une plasticité des propriétés écosystémiques. Cette approche permet alors de décrire l’émergence des boucles de régulation qui contrôlent le fonctionnement des écosystèmes, comme l’illustrent mes résultats le long de gradients de nutriments sur la transition entre régimes de succession ou encore l’émergence de culs-de-sac trophiques.