Relations entre espèces et habitats : de la théorie aux enjeux appliqués
Auteur / Autrice : | Martin Jeanmougin |
Direction : | Romain Julliard, Emmanuelle Porcher |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Ecologie - Biologie de la Conservation |
Date : | Soutenance le 30/01/2017 |
Etablissement(s) : | Paris, Muséum national d'histoire naturelle |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sciences de la nature et de l'Homme - Évolution et écologie (Paris ; 1995-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Centre des sciences de la conservation (Paris ; 2003-....) |
Jury : | Examinateurs / Examinatrices : Romain Julliard, Emmanuelle Porcher, Françoise Burel, Jean-Christophe Foltête, Jean-Yves Barnagaud, Vincent Bretagnolle |
Rapporteurs / Rapporteuses : Françoise Burel, Jean-Christophe Foltête |
Mots clés
Résumé
Le constat actuel d’une perte de biodiversité est largement partagé au sein de la communauté scientifique mais également auprès du public et du monde politique. L’attention portée depuis plus d’une décennie aux changements climatiques et à leurs effets sur la biodiversité a parfois conduit à négliger le principal facteur d’érosion de la biodiversité : la destruction des habitats. Le but de cette thèse est d’étudier les relations entre espèces et habitats avec un focus particulier sur différentes composantes de ces relations.La thèse aborde ainsi dans une première partie l’histoire et l’évolution du concept d’habitat en écologie et met en évidence une construction complexe de ce concept. Celle-ci montre par exemple une dichotomie autour de la définition du concept d’habitat avec une approche espèce-centrée d’un côté et une approche communauté-centrée de l’autre. Ces deux définitions se retrouvent aujourd’hui avec divers degrés d’importance dans leur utilisation selon les différents acteurs de la conservation, des scientifiques aux politiques. Ensuite, au travers du prisme de l’écologie du paysage, la thèse s’intéresse aux problématiques des échelles spatiales via une étude sur la distribution d’espèces d’arthropodes dans les paysages métropolitains. Les résultats mettent en évidence que les échelles spatiales de réponses des espèces aux mesures du paysage sont très variables et ceci indépendamment de la représentation choisie du paysage. La théorie prédirait pourtant une certaine cohérence en fonction par exemple de certains traits écologiques. Ainsi, l’échelle spatiale de relations des espèces avec le paysage, qui est considérée comme l’échelle de perception et d’interaction des espèces avec le paysage, semble difficile à caractériser en utilisant les méthodes habituellement appliquées en écologie des paysages. La relation entre espèces et habitats peut se quantifier via les mesures de spécialisation. Nous avons taché de comprendre comment les espèces dites spécialistes se répartissent le long d’un gradient continu d’habitat et en particulier le rôle des environnements hétérogènes dans ces patrons de spécialisations. Dans ce cadre théorique, l’hypothèse de complémentation, qui stipule que certaines espèces ont besoin d’une certaine hétérogénéité environnementale, n’a pas pu être vérifiée. En effet, même si certaines espèces présentent des affinités particulières pour ces milieux hétérogènes, elles n’en sont pas pour autant spécialistes. Ces espèces semblent plutôt des généralistes qui sont exclues des milieux plus homogènes où l’on retrouve plus fréquemment des espèces spécialistes, plus compétitives. Ces résultats permettent d’apporter un éclairage nouveau sur les règles d’assemblages des communautés d’espèces, en particulier le long d’un gradient continu d’habitat. Finalement, l’implication du concept d’habitat dans les politiques publiques de conservation a été étudiée en menant une évaluation du volet « habitat » de la Directive Habitats européenne. Différents critères, touchant autant à l’application qu’à la construction, à la légitimation et aux aboutissements de la directive en matière de conservation ont été utilisés pour cette évaluation. A travers des exemples concrets et l’analyse du corpus bibliographique, ce travail a permis identifier d’importantes lacunes de connaissances au sein de la directive qui entravent ces critères. Ce travail met finalement en évidence un découplage entre les aspects scientifiques et leurs applications dans la directive et questionne l’opportunité d’utiliser le niveau habitat pour répondre à des problématiques de conservation. En conclusion, ce travail de thèse, axé sur le concept d’habitat, a permis d’identifier certaines complexités, théoriques ou appliquées, qui peuvent entraver une meilleure compréhension des relations entre espèces et habitats et il offre des pistes pour mieux les appréhender et pousse ainsi à penser autrement ces relations.