Utilisation des isotopes stables et radiogéniques du strontium pour tracer la provenance des bois : application à des épaves sous-marines
Auteur / Autrice : | Fadi Hajj |
Direction : | François Guérold, Anne Poszwa |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Géosciences |
Date : | Soutenance le 14/11/2017 |
Etablissement(s) : | Université de Lorraine |
Ecole(s) doctorale(s) : | RP2E - Ecole Doctorale Sciences et Ingénierie des Ressources, Procédés, Produits, Environnement |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Laboratoire Interdisciplinaire des Environnements Continentaux (Vandoeuvre-lès-Nancy) |
Jury : | Président / Présidente : Isabelle Techer |
Examinateurs / Examinatrices : Étienne Dambrine, Thomas Drouet, Julien Bouchez | |
Rapporteur / Rapporteuse : Étienne Dambrine, Thomas Drouet |
Résumé
Au début des temps modernes (16ème - 18ème siècles), la construction de grands navires était primordiale pour le développement des rencontres culturelles dans ce qui est devenu l'âge de la découverte et de l'expansion européenne. L’Espagne était une des grandes puissances de l’époque. Le projet européen « ForSEAdiscovery » cherche dans ce contexte à répondre aux questions clés suivantes : les ressources forestières ibériques de l’époque soutenaient-elles la demande croissante de bois, ou bien ce bois était-il importé d’autres pays ? Si ces bois ne provenaient pas de l’Espagne, comment les réseaux de commerce étaient-ils organisés ? Ce projet aborde ces questions à travers un programme de recherche multidisciplinaire et innovant pour améliorer la compréhension de notre passé historique et de notre patrimoine culturel, et développer notre connaissance sur l'utilisation passée des ressources en bois pour la construction navale. L'objectif de cette thèse, qui s’insère dans ce projet, est d’identifier la provenance des bois utilisés dans la construction navale ibérique en utilisant des traceurs géochimiques. L’hypothèse est que les arbres se développant sur des roches et des sols contrastés possèdent des signatures géochimiques spécifiques héritées des roches. Les signatures isotopiques en strontium (87Sr/86Sr) peuvent notamment être des indicateurs de provenance géographique. Dans ce contexte, la démarche suivie dans la thèse a consisté à caractériser la signature isotopique en Sr dans des bois d'épaves de bateaux et dans les bois d’arbres actuels, les sols et roches prélevés dans les principaux peuplements forestiers espagnols pointés comme lieux de production des bois entre le 16ème - 18ème siècles. Les signatures en δ88/86Sr, traceur peu connu encore, ont également été caractérisées dans les échantillons. Les types et les âges des roches ont été caractérisés et les liens entre les rapports isotopiques 87Sr/86Sr et δ88/86Sr dans les roches, sols et arbres ont été étudiés sur les sites espagnols échantillonnés. La signature locale des sites espagnols potentiels de provenance de bois a été déterminée. Nos résultats mettent en évidence que le rapport isotopique 87Sr/86Sr dans les arbres reflète la signature de la fraction échangeable des sols sur lesquels ils croissent alors que le δ88/86Sr est affecté par le fractionnement, les isotopes légers (86Sr) étant préférentiellement incorporés dans les arbres laissant la fraction échangeable du sol enrichie avec les isotopes lourds (88Sr). Ce fractionnement observé pour les chênes, n’est pas marqué dans le bois des pins suggérant que le fractionnement isotopique durant le transfert du Sr entre le sol et l’arbre est dépendant de l’espèce. La contamination des bois d’épaves par les éléments marins a été identifiée. Le Sr marin se retrouve notamment sous forme adsorbée ou dans la structure des minéraux précipités dans les bois immergés. Différentes expériences d’extractions ont été testées et un protocole adapté a été développé pour extraire les éléments marins et retrouver la signature originelle du bois archéologique. Nous avons réussi à valider un protocole d’extraction et retrouver la signature originelle d’un échantillon de bois d’épave. Ce résultat souligne le potentiel et l’importance d’une nouvelle méthode combinant 87Sr/86Sr et δ88/86Sr pour des futures études de provenance de bois ou autres matériaux. Cependant, nos résultats indiquent également que beaucoup de nos échantillons de bois archéologiques n’ont pas conservé leur Sr originel. Partant de ce constat, des préconisations sont proposées pour améliorer la possibilité d’utilisation de ce traceur dans les études futures de provenance de bois archéologiques sous-marins