Les résistances territorialisées aux réformes de modernisation des services d'eau : le cas de l’agglomération grenobloise
Auteur / Autrice : | Antoine Brochet |
Direction : | Bernard Pecqueur |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Urbanisme -Aménagement |
Date : | Soutenance le 10/11/2017 |
Etablissement(s) : | Université Grenoble Alpes (ComUE) |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale sciences de l'homme, du politique et du territoire (Grenoble ; 2001-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Pacte, laboratoire de sciences sociales (Grenoble, Isère, France) |
Jury : | Président / Présidente : Emmanuelle Hellier |
Examinateurs / Examinatrices : Bernard Barraqué, Gabrielle Bouleau, Stéphane Ghiotti | |
Rapporteur / Rapporteuse : Emmanuelle Hellier, Géraldine Pflieger |
Résumé
La question des résistances à la mise en œuvre des programmes d’action publique de l’État fait partie des questions de recherche peu étudiées. L’idée défendue tout au long de la thèse est que la notion de résistance territorialisée permet d’expliciter les logiques qui guident la mise en œuvre des programmes d’action publique. Notre analyse prend pour étude l’appropriation locale des réformes de modernisation des services d’eau potable. Ces réformes d’inspiration néolibérale apparues dans les années 1980 font l’objet de bilans intermédiaires mitigés et de critiques concernant leur efficacité. Le cas d’étude retenu est celui de l’agglomération grenobloise. Notre travail repose sur une enquête de terrain menée pendant cinq ans dans le cadre de notre activité salariée auprès d’une cinquantaine de services d’eau potable. Notre thèse s’articule en deux parties et quatre chapitres. La première partie s’intéresse au contenu des réformes de modernisation et aux résistances territorialisées qu’elles engendrent. La seconde partie propose d’approfondir la compréhension des résistances territorialisées en appréhendant le service d’eau comme un système territorial complexe qui s’oppose à la logique des réformes. Le premier chapitre de la thèse analyse les réformes de modernisation. D’une part, nous expliquons l’origine et le contenu des réformes et, d’autre part, nous proposons une méthode prospective d’aide à la décision permettant d’évaluer leurs effets économiques et sociaux sur les services d’eau. Le deuxième chapitre rend compte de l’application de deux réformes, mesure l’ampleur des résistances et les qualifie. La première réforme étudiée concerne la création d’indicateurs de performance des services d’eau potable. La seconde consiste en la transformation de l’usager du service d’eau en consommateur. Notre étude montre que les résistances sont nombreuses et variées et produisent des défaillances dans la gouvernance du secteur. Le troisième chapitre présente une analyse historique qui restitue le processus de construction territorialisée des services d’eau potable dans l’agglomération grenobloise. Nous mettons en lumière le rôle déterminant des facteurs territoriaux et nous montrons qu’historiquement, pour ce qui est de la régulation, l’Etat n’a été qu’un acteur parmi d’autres peu capable de contraindre formellement l’action des services d’eau. Enfin, la solution proposée par l’État pour répondre aux problèmes de modernisation est analysée et critiquée dans le quatrième chapitre. Cette solution consiste à transférer la compétence eau potable aux Établissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI) à fiscalité propre. La thèse met en évidence que cette solution peut aboutir à des résistances territoriales fortes au sein des services d’eau pouvant faire échec à la mise en place d’une gestion unifiée de l’eau à l’échelon intercommunal. Cependant, nous montrons que paradoxalement les résistances territoriales peuvent être génératrices de processus d’innovation sociale sans être nécessairement incompatibles avec certains objectifs des réformes de modernisation. Dans ces cas, des modèles de gestion de l’eau ad hoc peuvent émerger et se révéler particulièrement adaptés aux enjeux contemporains. Ces résultats de recherche nous conduisent à défendre l’intérêt d’une évolution de l’action publique hydrique vers des politiques territoriales pluralistes.