Approche ergonomique de l’analyse des risques en radiothérapie : de l’analyse des modes de défaillances à la mise en discussion des modes de réussite
Auteur / Autrice : | Sylvie Thellier |
Direction : | Pierre Falzon, Lucie Cuvelier |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Psychologie, psychologie clinique, psychologie sociale. Ergonomie |
Date : | Soutenance le 12/12/2017 |
Etablissement(s) : | Paris, CNAM |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Abbé Grégoire (Paris) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Centre de recherche sur le travail et le développement (2007-... ; Paris) |
Institut : Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire (Fontenay-aux-Roses ; 2002-....) | |
Jury : | Président / Présidente : Alain Garrigou |
Examinateurs / Examinatrices : François Jeffroy | |
Rapporteur / Rapporteuse : Benoît Journé, Philippe Giraud |
Résumé
Cette recherche s’inscrit dans le domaine de la gestion des risques et de la sécurité des patients, et vise à développer une méthode d’analyse de la fragilisation de l’activité pour faire face aux difficultés méthodologiques rencontrées par les centres de radiothérapie pour mener une analyse des risques encourus par les patients à partir de la méthode AMDEC. Cette thèse est une contribution empirique et théorique sur la « sécurité en réflexion » dans des espaces de discussion (régulation froide) que l’on distingue ici de la « sécurité en action » (régulation chaude). Ce travail cherche à déterminer de nouveaux liens entre la sécurité et la gestion des risques – relation éminemment connectée mais également chargée d’ambiguïtés – en donnant une place prépondérante à une étape méthodologique souvent délaissée, l’identification des risques. La sécurité des soins dépendant principalement des pratiques quotidiennes exercées par le personnel soignant, il s’agirait pour les analystes de faire le lien entre un risque générique facilement identifiable – par exemple, la surexposition des patients à des rayonnements ionisants – et sa construction, sa propagation dans le travail réel de l’équipe soignante. Cette recherche propose de travailler ce lien collectivement dans des « espaces de discussion » mobilisés classiquement par les sciences de gestion pour accompagner un changement ou pour améliorer la performance d’une organisation, et de les adapter pour identifier les risques à partir de l’analyse de la qualité du travail quotidien d’une équipe de radiothérapie. La thèse défendue dans ce travail est la suivante : la sécurité des patients dépend de la production de nouvelles connaissances 1) sur la complexité du travail de l’équipe soignante, 2) sur les modes de réussite mobilisés par les soignants pour résoudre ou contourner les complexités de leurs activités et 3) sur les conditions de fragilisation des modes de réussite. Autrement dit, la finalité de cette analyse des risques serait un recueil de données organisées sur ce qui se passe dans le travail et ce qui l’affecte. Ce recueil viserait à améliorer les informations détenues individuellement sur la complexité du travail collectif transverse, à mettre en visibilité des dimensions plus difficilement accessibles (politique, stratégique, organisationnelle, contextuelle…) et à faire des liens entre les complexités du travail et les risques encourus par les patients à partir d’un objet intermédiaire : les fragilisations des modes de réussite. L’objectif recherché de ces « Espaces de Partage et d’Exploration de la Complexité du Travail » (EPECT) est d’améliorer la connaissance individuelle et collective sur le développement des situations risquées dans le travail et de les partager dans l’équipe pour maximiser la sécurité réelle. La consolidation de l’étape d’identification des risques par une caractérisation et un partage de situations risquées dans le travail devrait améliorer le travail d’équipe et faciliter la maitrise des situations risquées. Le croisement de deux disciplines, l’ergonomie et la gestion des risques a permis d’enrichir les principes méthodologiques portés par chacune d’elle, des moyens de décrire des complexités de l’activité pour l’ergonomie et des situations risquées réelles pour l’ingénierie des risques. Au-delà de ces apports méthodologiques, l’ergonomie a été mobilisée pour élaborer progressivement de nouveaux principes méthodologiques à partir des limites réelles d’anciens principes méthodologiques et pour évaluer la méthode. Le nombre et « l’intensité » des difficultés méthodologiques rencontrées par les utilisateurs pourraient déterminer un lien faible ou fort entre la méthode de gestion des risques mobilisée et la sécurité des patients. Enfin, ce travail a été l’occasion de proposer une évolution du concept de sécurité réglée et de sécurité gérée et une nouvelle définition du risque.