Thèse soutenue

La chimioprophylaxie antituberculeuse primaire par isoniazide à l’ère des traitements antirétroviraux

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Auteur / Autrice : Anani dodzi Badje
Direction : Xavier Anglaret
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Santé publique. Option Informatique et Santé
Date : Soutenance le 13/12/2017
Etablissement(s) : Bordeaux
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sociétés, politique, santé publique (Talence, Gironde ; 2011-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Bordeaux population Health
Jury : Président / Présidente : Valériane Leroy
Examinateurs / Examinatrices : Christine Danel, François-Xavier Blanc, Jean-François Tessier
Rapporteurs / Rapporteuses : Philippe Msellati, Kigninlman Horo

Mots clés

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Mots clés contrôlés

Résumé

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Fléau mondial depuis des millénaires, la tuberculose (TB) a régressé dans la deuxième moitié du 20ème siècle avant de connaitre une résurgence à partir des années 1980 à la faveur de la pandémie du VIH. Les deux maladies se potentialisent mutuellement et forment un « couple infernal ». En Afrique, la TB est la première cause de mortalité des adultes infectés par le VIH, quel que soit leur niveau d’immunité. Une des mesures pour lutter contre la TB associée au VIH est la chimioprophylaxie, consistant à traiter une infection tuberculeuse latente pour prévenir l’évolution vers une TB maladie. La mieux évaluée, consiste à prescrire 6 à 12 mois de monothérapie d’isoniazide (Isoniazid Preventive Therapy, IPT). Depuis 1993, l’OMS recommande la prescription de 6 mois d’IPT chez toutes les personnes infectées par le VIH sans signe de TB active. Malgré des preuves scientifiques solides à l’appui de cette recommandation, l’utilisation de l’IPT est toujours restée faible. Avant notre travail, trois raisons expliquaient cette faiblesse : (i) la crainte qu’une chimioprophylaxie mal appliquée ne favorise l’émergence de résistances ; (ii) le fait que les essais avaient démontré l’efficacité de l’IPT pour réduire l’incidence de TB, pas pour réduire la mortalité ; (iii) le fait que les essais d’IPT avaient eu lieu en majorité avant l’ère des antirétroviraux (ARV), chez des personnes très immunodéprimées. Les ARV permettant également de réduire le risque de TB en faisant régresser l’immunodépression, certains considéraient que l’IPT était devenue inutile. Dans cette thèse nous faisons d’abord un rappel des connaissances essentielles sur l’infection par le VIH, la TB, l’association TB/VIH, et le concept de chimioprophylaxie antituberculeuse. Puis nous exposons les résultats de l’analyse du suivi prolongé de l’essai randomisé Temprano ANRS 12136, qui s’est déroulé entre 2008 et 2015. Cet essai a suivi 2056 adultes infectés par le VIH dans 9 centres de soins à Abidjan. Les participants qui avaient des CD4 élevés (moyenne 477/mm3) étaient randomisés en 4 bras pour étudier deux interventions : 6 mois d’IPT (reçu vs. non reçu) et ARV (début immédiat vs. début différé). Les participants ont été suivis pendant 4,9 ans en moyenne. 89% d’entre eux ont débuté des ARV. Pendant le suivi, il y a eu 86 décès, 34 dans le groupe avec IPT (probabilité à 6 ans : 4,1% ; IC95% 2,9–5,7) et 52 dans le groupe sans IPT (probabilité à 6 ans: 6,9% ; 5,1–9,2). Le Hazard ratio de décès dans le groupe avec IPT par rapport à l’autre groupe était 0,63 (95% CI 0,41-0,97). Il n’y avait pas d’interaction entre IPT et ARV précoce, ni entre IPT et le temps. Ces résultats ont été publiés dans The Lancet Global Health. Enfin nous discutons ces résultats avec ceux des essais d’IPT précédents, dans une revue critique de la littérature analysant les données d’efficacité et de tolérance, les déterminants de l’efficacité, et les risques de résistance. Nous montrons que l’essai Temprano complète et élargit le spectre des connaissances, et que les preuves scientifiques accumulées depuis 1993 jusqu’à l’essai Temprano inclus suggèrent que les ARV modifient certains paramètres de l’IPT qu’on pensait solidement établis. Avant l’ère des ARV on considérait que l’efficacité de l’IPT était forte chez les personnes avec IDR positive mais très faible voire inexistante chez les personnes avec IDR négative, qu’il y avait une perte d’efficacité de l’IPT au cours du temps et que l’IPT n’avait pas d’effet sur la mortalité. Avec les ARV, on voit que l’IPT est efficace quel que soit le résultat des tests tuberculiniques, que cette efficacité est prolongée, et qu’elle se traduit non seulement par une réduction de la TB mais aussi de la mortalité. L’IPT reste donc une intervention d’une grande actualité à l’ère des ARV. Ces résultats devraient convaincre les pays jusque-là réticents à appliquer les recommandations de l’OMS.