Thèse soutenue

Des machines à produire des futurs économiques : sociologie des intelligences artificielles marchandes à l'ère du big data
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Auteur / Autrice : Jean-Sébastien Vayre
Direction : Franck Cochoy
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sociologie
Date : Soutenance le 28/11/2016
Etablissement(s) : Toulouse 2
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Temps, Espaces, Sociétés, Cultures (Toulouse)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre d'étude et de recherche travail, organisation, pouvoir (Toulouse ; 1994-....)
Jury : Président / Présidente : Emmanuel Kessous
Examinateurs / Examinatrices : Franck Cochoy, Dominique Boullier, Dominique Cardon, Anne Mayère
Rapporteurs / Rapporteuses : Emmanuel Kessous, Dominique Boullier

Résumé

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La plupart des experts s’accordent à dire que le big data marque une rupture. Peut-être ont-ils raison. Mais cette rupture n’est pas vraiment matérielle, ni même organisationnelle. Cela fait déjà longtemps que les grands acteurs du web explorent et exploitent quotidiennement de grandes masses de données. Si révolution il y a, elle se joue ailleurs, à la périphérie de la grande disruption que mettent en scène la plupart des promoteurs du big data. Pour s’en rendre compte, il suffit de se poser la question qui suit : en pointant le caractère révolutionnaire des mégadonnées et des dispositifs permettant de les traiter, que font ces acteurs ? Ils préparent une intégration massive des intelligences artificielles au sein des différentes sphères de la société. S’il existe une rupture, elle se trouve donc plutôt ici : dans ce mouvement que nous connaissons aujourd’hui et qui consiste, pour une grande diversité d’acteurs socioéconomiques, à s’approprier des agents de calcul qui sont toujours plus autonomes et puissants. Aussi, afin de mieux saisir les enjeux de cette démocratisation, nous proposons dans cette thèse d’étudier le cas des machines à produire des futurs économiques : quel est leur rôle au sein de ces collectifs sociotechniques que composent les marchés ? Pour répondre à cette question, nous nous appuierons sur une ethnographie multi-située que nous avons conduite de 2012 à 2015 selon une posture se trouvant à la croisée des sociologies des marchés, des sciences et des techniques. Plus précisément, nous mobiliserons un corpus d’archives ainsi qu’un important matériau d’enquête recueilli auprès de plusieurs professionnels, entreprises et salons afin d’examiner la fabrication et le fonctionnement de ces machines à prédire les avenirs marchands. Nous verrons ainsi qu’au niveau de l’environnement de conception, ces dernières sont intéressantes dans la mesure où elles sont généralement dotées d’une intelligence locale qui doit faire advenir, dans le présent, des futurs permettant d’optimiser les intérêts économiques de ceux qui les implémentent. À partir d’une série d’études et d’expérimentations portant sur les usages d’un agent de recommandation, nous montrerons que cette forme d’intelligence est toutefois discutable puisqu’elle peut comporter d’importantes ambivalences du point de vue des utilisateurs. Ceci nous permettra de souligner qu’aux niveaux cognitif et relationnel, la pertinence des machines à produire des futurs économiques doit faire l’objet d’une mise en question systématique. Les enjeux sont importants puisqu’il n’est pas impossible que leur avènement massif au sein des organisations instaure de nouvelles asymétries sur les marchés qui ne sont pas un bien pour la communauté.