Thèse soutenue

Sélection, plasticité et dérive façonnent les traits d’histoire de vie chez l’acarien ravageur de cultures Tetranychus urticae suite à un changement d'hôte

FR  |  
EN
Auteur / Autrice : Cassandra Marinosci
Direction : Isabelle OlivieriSara Magalhães
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Écologie, évolution, ressources génétique, paléobiologie
Date : Soutenance le 06/07/2016
Etablissement(s) : Montpellier
Ecole(s) doctorale(s) : GAIA (Montpellier ; École Doctorale ; 2015-...)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Institut des sciences de l'évolution (Montpellier)
Jury : Examinateurs / Examinatrices : Isabelle Olivieri, Sara Magalhães, Jacques Van Alphen, Maria Navajas, Jean-Christophe Simon, Margarida Matos

Résumé

FR  |  
EN

Les herbivores polyphages sont des généralistes capables d’exploiter une large gamme de plantes hôtes. Au cours des travaux de cette thèse en évolution expérimentale, nous étudions l’évolution de traits d’histoire de vie de différentes populations d’une espèce de ravageur de culture, l’acarien Tetranychus urticae, suite à la colonisation d’un même nouvel hôte, la tomate. Au cours des deux premiers chapitres, des mesures de traits d’histoire de vie ont été collectées depuis le stade œuf jusqu’à la mort des individus permettant de décrire finement le cycle de vie de cet acarien en réponse à l’exploitation de la tomate. Dans le chapitre 1, j’ai montré que la survie au stade juvénile était étroitement liée à des effets maternels. Notamment, les mères s’étant préalablement développées sur la plante de tomate conféraient à leurs descendants une meilleure survie juvénile sur cet hôte. Cependant, ces juvéniles quittaient davantage la plante une fois adulte et avaient une fécondité (pour les femelles) réduite. De plus, l’histoire évolutive des populations affectait la proportion de femelles produites par les mères améliorant potentiellement la démographie des populations. Dans le second chapitre, j’ai montré que plusieurs traits d’histoire de vie (survie juvénile, survie adulte mâle et fécondité) avaient évolué dans les populations exposées à la tomate depuis plusieurs générations à comparer des populations témoins ayant évolué sur haricot. Néanmoins, l’étude du succès reproducteur total des femelles intégrant l’effet de plusieurs traits de vie montre paradoxalement un signal clair d’adaptation au nouvel hôte seulement pour des populations ayant évolué sur cet hôte pendant environ 38 générations et non pour des populations ayant évolué sur cette plante hôte pendant environ 78 générations. L’étude de la diversité génétique, sur la base de marqueurs microsatellites, suggère que ces dernières populations ont souffert de goulots d’étranglement, ce qui pourrait avoir compromis leur adaptation. Pour finir, dans le chapitre 3, je teste si les populations nouvellement adaptées à la tomate sont plus tolérantes aux défenses de la plante, induites par l’attaque d’herbivores, ou bien si ces populations induisent différents niveaux de défense chez les plantes attaquées, affectant la performance des acariens qui les colonisent ultérieurement. Pour cela, des acariens ont été mis en ponte sur des plantes de tomates non pré-infestées, pré-infestées par des acariens adaptés à la tomate ou pré-infestées par des acariens non adaptés à cet hôte. Les populations adaptées à la tomate ont une fécondité plus forte sur cette plante, quel que soit le traitement de la plante, tandis que toutes les populations d’acariens voient leur mortalité augmenter sur les plantes pré-infestées par des acariens adaptés à la tomate. Mes résultats semblent indiquer que l’évolution sur tomate se manifeste par une plus grande capacité à tolérer les défenses de cette plante et une plus grande induction de ces défenses.Ainsi, mon étude décrit un continuum de réponses évolutives chez un polyphage allant de l’absence de détection d’adaptation, conduisant à l’extinction des populations, à la présence de réponses plastiques adaptatives, jusqu’au processus d’adaptation à la plante hôte via possiblement l’acquisition de la capacité à tolérer les défenses de la plante hôte. Ces travaux soulignent l’importance d’intégrer l’effet des variations contrastées de différents traits d’histoire de vie dans une mesure de valeur sélective afin de décrire l’adaptation à une nouvelle plante hôte. Des investigations futures en ce sens permettraient d’enrichir la littérature sur la persistance des herbivores suite à la colonisation de nouvelles plantes hôtes mais aussi d’affiner nos compétences en terme de contrôle d’espèces de ravageurs.