Thèse soutenue

L'impossible convivialité communautaire? : étude du vécu des dispositifs de loisirs associatifs liés au VIH dans une région française

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Auteur / Autrice : Estelle Duval
Direction : Sylvain FerezAnne Marcellini
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sociologie
Date : Soutenance le 14/12/2016
Etablissement(s) : Montpellier 3
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale 60, Territoires, Temps, Sociétés et Développement (Montpellier ; 2015-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire Santesih - Santesih / Santesih
Jury : Président / Présidente : François Sicot
Examinateurs / Examinatrices : Christelle Marsault
Rapporteurs / Rapporteuses : Patrick Fougeyrollas

Résumé

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Avec l’arrivée d’un traitement efficace, faisant basculer l’infection au VIH dans la catégorie des « maladies chroniques », les associations VIH ont développé des dispositifs d’amélioration de la « qualité de vie ». Ces dispositifs de santé publique se fondent, entre autres, sur des activités de « loisirs » jugées bénéfiques pour la santé des personnes vivant avec le VIH (PVVIH). Parallèlement, la sociologie du VIH nous montre à quel point le vécu de cette infection est hanté par la crainte de la stigmatisation, qui engendre une gestion souvent lourde de la visibilité d’un trait discréditable (Goffman, 1963). Pourtant, la question de la gestion du stigmate n’apparait pas dans la conception des activités associatives. Comment s’articulent la logique sanitaire de ces dispositifs et l’expérience de ces personnes confrontées à cette lourde gestion du stigmate ? Qu’apportent ces dispositifs associatifs aux PVVIH ? Cette thèse porte sur l’expérience que les PVVIH font des dispositifs associatifs d’amélioration de la qualité de vie. Pour saisir cette expérience, une enquête ethnographique par observation participante a été menée durant 9 mois au sein des activités de « loisir » de quatre associations, dans deux départements d’une région française. Les données recueillies ont été complétées par vingt-deux entretiens avec des PVVIH, ayant recours ou non à ces dispositifs, et par la réalisation de trois entretiens avec les fondateurs de ces dispositifs permettant de saisir le contexte socio-historique de leur développement. En tant que dispositif de santé publique, les activités associatives sont conçues comme des espaces de socialisation au rôle de « bon malade » chronique. L’amélioration de la qualité de vie passe alors par la normalisation des pratiques des PVVIH dans une perspective de soin de soi et de prévention. Les dispositifs de santé publique mis en œuvre à cette fin sont toutefois plus ou moins instrumentalisés (Lascoumes et Le Galès, 2004) par les acteurs en fonction de leur expérience et de leurs dispositions. Les trajectoires des responsables associatifs et les modalités de gestion de ces associations (dirigées par des PVVIH ou par des professionnels médicosociaux) les conduisent à construire des marges de liberté propres face à la logique sanitaire proposée par leur environnement institutionnel, qui donnent des colorations particulières à la notion de qualité de vie. Les problématiques liées à la gestion du stigmate et la recherche de liens communautaires demeurent dans tous les cas occultés par l’importance accordée à la qualité de vie. Dans ce cadre, les trajectoires de vie et les dispositions des PVVIH (liées à leur situation professionnelle, à leur situation sanitaire, à leur trajectoire de prise en charge médicale) les conduisent soit à éviter les associations pour préserver l’invisibilité d’un trait discréditable, soit à recourir à ces associations pour, par-delà les dispositifs de prise en charge proposés, nouer des liens communautaires préservés du risque de stigmatisation. L’accès à ce type de liens ne peut toutefois être réalisé qu’à la condition d’une apparente adhésion aux normes véhiculées par des dispositifs associatifs finalement peu sensibles à leur désir de convivialité communautaire.