''Heimat Südtirol'' : la cohabitation des germanophones et des italophones dans le département de Bolzane (Italie)
Auteur / Autrice : | Ingrid Kofler |
Direction : | Jan Spurk, Roberto Cipriani |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sociologie |
Date : | Soutenance le 26/09/2015 |
Etablissement(s) : | Sorbonne Paris Cité en cotutelle avec Università degli studi Roma Tre |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sciences humaines et sociales : cultures, individus, sociétés (Paris ; 1994-2019) |
Partenaire(s) de recherche : | établissement de préparation : Université Paris Descartes (1970-2019) |
Jury : | Président / Présidente : Yves Sintomer |
Examinateurs / Examinatrices : Jan Spurk, Roberto Cipriani, Yves Sintomer, Max Haller | |
Rapporteur / Rapporteuse : Yves Sintomer, Max Haller |
Résumé
Cette étude aspire à expliquer les raisons de la cohabitation - basée sur une différentiation linguistique - entre les germanophones et les italophones qui constituent la population du département du Haut-Adige/Tyrol du Sud (situé dans l'extrémité nord-orientale de l'Italie). Ce territoire, qui appartenait, historiquement, au Tyrol autrichien, a été annexé à l'Italie en 1918, raison pour laquelle il est constitué de deux tiers de germanophones qui ont toutefois réussi à maintenir leurs spécificités (notamment linguistique et culturelle) grâce à une large autonomie administrative et juridique, obtenue en 1972 après bien des vicissitudes faites de vexations et de luttes revendicatives. Cette autonomie a instauré un système social basé sur la séparation, institutionnellement orchestrée et idéologiquement alimentée par le monde politique et médiatique, des deux groupes linguistiques. Cela a engendré, chez les habitants italophones, un fort « malaise » identitaire. En partant du présupposé que le « modèle sud-tyrolien » - dont la genèse et la mise en pratique font l'objet d'explicitations - n´est pas remis en question dans la mesure ou il est désormais devenu une « seconde nature ». La question qui est au centre de cette recherche consiste à se demander pourquoi cette réalité binaire, fondée sur une distinction « ethnique », se maintient dans le temps malgré une ambition déclarée d'interculturalité et de bilinguisme. Cette étude, axée sur l'immersion dans la quotidienneté de la population, nous porte à interroger la quotidienneté et la subjectivité des individus : il s´agit d´accéder à leurs visions du monde grâce à l'analyse de leur imaginaire social, de leurs mémoires collectives, de leur définition de l´autre et des identités sud-tyroliennes. Ainsi, si la langue et les institutions freinent le contact entre les deux groupes, la dynamique de reproduction de la séparation est intériorisée et par conséquent pratiquée par les individus. De fait, la Heimat - concept propre au monde germanophone qui a fini par s'imposer largement au sein de ce travail - participe en tant que « monde-de-la-vie » à cette séparation vécue dont la remise en question saperait les fondements mêmes de ce vivre ensemble spécifique qui va désormais de soi. Malgré la « dimension utopique » qu'elle renferme (Bloch), il semble difficile, au vu du fatalisme de la population qui s'en remet aux générations à venir, de se soustraire à cette « Heimat Südtirol » qui ne laisse que peu de place à l'idée d'un avenir autre capable de dépasser la séparation.