Muséalités de l'espace urbain : l'œuvre comme dispositif de médiation dans l'espace public au tournant du XXIe siècle
Auteur / Autrice : | Michèle Ginoulhiac |
Direction : | Dominique Clévenot, Isabelle Alzieu |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Arts et Sciences des arts |
Date : | Soutenance le 03/12/2015 |
Etablissement(s) : | Toulouse 2 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Arts, Lettres, Langues, Philosophie, Communication (Toulouse) |
Partenaire(s) de recherche : | Equipe de recherche : Lettres, langages et arts (Toulouse) |
Jury : | Président / Présidente : Itzhak Goldberg |
Examinateurs / Examinatrices : Dominique Clévenot, Isabelle Alzieu, Jean Davallon | |
Rapporteur / Rapporteuse : Itzhak Goldberg, Jean Davallon |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
« Musée à ciel ouvert » est devenu une formule de communication choisie par quelques métropoles pour valoriser leur patrimoine artistique auprès du public. Nous allons interroger sa validité en regard de la notion de muséalité, puisque les règles du musée sont dûment convoquées pour légitimer l’espace urbain comme un lieu de mémoire. La muséalité, prise dans son sens le plus large, désigne « la valeur culturelle ou la qualité d’une chose muséalisée », c’est-à-dire la valeur de témoignage de la réalité qu’elle informe. Cette valeur, « en rapport avec l’aspect ontologique de la réalité, est conditionnée par sa pluridimensionnalité et sa charge énergétique, elle dépasse les valeurs temporaires par son importance culturelle. » Or, si l’espace urbain est bien un musée, les formes muséalisées, à savoir l’art public, en appellent à revoir ces valeurs qui restent trop attachées à l’objet. Cette valeur culturelle prêtée aux objets muséaux par l’institution traditionnelle est actée grâce aux frontières que cette dernière établit avec la réalité. Dans un premier temps, nous verrons comment la remise en question de ces limites oblige à repenser les qualités des choses muséalisées. Dans un deuxième temps, nous examinerons l’hypothèse suivante : les pratiques plastiques contemporaines, qu’elles soient ou non autorisées, et notamment celles de l’installation et de l’installation in situ vont accélérer le processus de questionnement de la muséalité. En effet, les recherches des plasticiens concernant le rapport de l’œuvre au lieu et au spectateur vont permettre d’envisager la notion de sculpture de manière élargie. Elles font notamment ressortir les qualités inhérentes au lieu, à ses mémoires identitaires hybrides qui nous paraissent être la clé d’une redéfinition de valeurs muséales plus attachées à une dimension sociale. De fait, l’objet n’est plus le seul légitime porteur de ces valeurs, l’espace ou même une situation peuvent se révéler avoir une importance culturelle. Aussi, la notion de muséalité doit-elle intégrer des valeurs temporelles de l’ordre de l’éphémère, du contingent et du précaire. Ces nouvelles valeurs ne peuvent advenir que parce que les outils de mémorisation, qui sont aussi des outils de diffusion, ont évolué : la photographie, Internet. L'espace urbain, en tant qu'espace public, a toujours été le lieu de dispositifs de démonstration du pouvoir et de commémorations. L’art sculptural en était l'outil privilégié. Au XXIe siècle, cet espace, qui devient le théâtre d'enjeux plus complexes liés à la métropolisation, garde pourtant l'œuvre comme média. Les commandes publiques s’accélérant, en lien aux innovations de l’architecture ou de l’urbanisme et à la valeur portée au patrimoine, tout semble aller dans le sens d’une esthétisation de l’espace public. L’œuvre va s’imposer comme un dispositif de médiation incontournable. Afin de préciser les enjeux de la valeur culturelle attachée à un tel dispositif, nous examinerons des cas actuels, différents et complémentaires, comme l’apport d’œuvres contemporaines sur le site patrimonial du Palais-Royal, mais aussi le site de La Défense à Paris qui propose plus d'une soixantaine de sculptures sur sa longue dalle piétonnière, ou encore le métro de Toulouse qui est doté d'une quarantaine d’œuvres conçues pour chaque station. Les qualités muséales de l'œuvre dans l’espace urbain ne s’évaluent pas en regard des mêmes critères que celles de l’œuvre dans l'institution du musée et nécessitent un changement de paradigme. Au sein de cet espace public, les dispositifs artistiques, muséaux et politiques se rencontrent autour d’objectifs communs de médiation plus que de médiatisation et redéfinissent la muséalité au plus près de son opérativité sociale.