Thèse soutenue

Shrinking networks ? : les nouveaux modèles économiques et territoriaux des firmes d'infrastructure face à la diminution de la consommation

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Auteur / Autrice : Daniel Florentin
Direction : Olivier Coutard
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Aménagement de l'espace, Urbanisme
Date : Soutenance le 03/12/2015
Etablissement(s) : Paris Est
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Ville, Transports et Territoires (Champs-sur-Marne, Seine-et-Marne ; 2015-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire Techniques, Territoires et Sociétés (Noisy-le-Grand, Seine-Saint-Denis) - Laboratoire Techniques- Territoires et Sociétés / LATTS
Jury : Président / Présidente : Sylvy Jaglin
Examinateurs / Examinatrices : Olivier Coutard, Sylvie Fol, Bernard Barraqué
Rapporteurs / Rapporteuses : Erik Swyngedouw, Franck Scherrer

Résumé

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Depuis une vingtaine d'années, la plupart des villes européennes font face à un phénomène inédit et imprévu, la diminution de la consommation des différents réseaux techniques urbains, et en particulier des réseaux d'eau. Ce phénomène s'explique par des raisons diverses allant des améliorations techniques de l'électro-ménager à la désindustrialisation en passant par les changements de comportement des usagers ou le développement de politiques visant la sobriété et un usage modéré des ressources naturelles. Il s'agit cependant d'un symptôme plus que d'un processus en soi. Cette baisse de la consommation est en effet le révélateur de l'épuisement progressif du modèle traditionnel de gestion des (grands) réseaux qui a prévalu jusqu'ici et qui a reposé principalement sur une augmentation de la demande et une extension continue du réseau selon la logique du « toujours plus et toujours plus loin ». Cette érosion du modèle traditionnel confronte les opérateurs de grands réseaux à une forme nouvelle de vulnérabilité, que nous appelons la vulnérabilité infrastructurelle, et dont les effets touchent l'ensemble des composantes du réseau, de l'usager au tuyau en passant par l'opérateur. Notre travail pose pour hypothèse forte que ce changement de contexte et de régime de consommation n'est pas une simple parenthèse, mais correspond à l'émergence d'un nouveau mode de gestion du réseau. Il peut être lu comme une bifurcation infrastructurelle, à savoir une transformation radicale et pérenne des modalités de gestion du réseau pour les adapter à ce régime décroissant (de demande).Face à ce défi nouveau, les opérateurs de réseaux techniques urbains ont dû s'adapter, pour faire évoluer leur modèle économique et leur assise territoriale. Afin d'en saisir les ressorts, nous avons opté pour une immersion de plusieurs mois au sein des équipes de deux entreprises locales (publique et semi-publique) confrontées à ces questions de baisse de consommation avec plus ou moins d'intensité, un opérateur multi-services à l'Est de l'Allemagne (les Städtische Werke de Magdeburg) et un opérateur d'eau et d'assainissement dans le Sud de l'Espagne (la EMASESA à Séville).Notre approche, mêlant Science and Technologies Studies, écologie politique urbaine et études sur la décroissance urbaine, nous permet de montrer que le modèle émergent est encore à la recherche de stabilité mais que des lignes de force communes sont observables dans les différents cas étudiés. Les stratégies d'adaptation mises en place par les opérateurs ne reposent pas seulement sur des ajustements techniques ou des augmentations tarifaires visant à compenser les pertes liées aux volumes non consommés. Le changement de modèle de gestion s'articule ainsi non seulement autour de transformations techniques fortes (downsizing, resizing, recentralisation), mais aussi de transformations organisationnelles et de changements importants des rapports entre opérateur et usager. Les opérateurs ont ainsi modifié leur rôle pour devenir davantage que des pourvoyeurs de fluide : leur modèle économique a ainsi accompagné un déplacement des lieux de production de la valeur pour les opérateurs, désormais plus tournés vers les services et l'aval de la filière. Ce changement de modèle économique a également une dimension spatiale puisque l'on observe également une transformation des échelles de gestion des opérateurs. La recherche de nouvelles économies d'échelle donne lieu à une extension des aires géographiques gérées par ces opérateurs locaux et à de potentiels conflits avec les acteurs des territoires progressivement intégrés. Une nouvelle géographie des réseaux techniques urbains semble ainsi émerger, faite de nouvelles formes de redistribution et de nouvelles sources de conflictualités. Ces différentes évolutions permettent de compléter des travaux théoriques sur la firme locale d'infrastructures et les modèles d'évolution des réseaux en y intégrant la dimension d'un régime décroissant de la demande