Le corridor ferroviaire méditerranéen : planification, politisation et territorialisation d'un projet d'aménagement
Auteur / Autrice : | Éloïse Libourel |
Direction : | Nacima Baron-Yellès |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Géographie |
Date : | Soutenance le 27/11/2015 |
Etablissement(s) : | Paris Est |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Ville, Transports et Territoires (Champs-sur-Marne, Seine-et-Marne ; 2010-2015) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Laboratoire Ville, mobilité, transport (Champs-sur-Marne, Seine-et-Marne) - Laboratoire Ville- Mobilité- Transport / LVMT |
Jury : | Président / Présidente : Jean Debrie |
Examinateurs / Examinatrices : Nacima Baron-Yellès, Juan Romero González, Jean-Pierre Wolff | |
Rapporteur / Rapporteuse : Josefina Cruz Villalón, Markus Hesse |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Mots clés libres
Résumé
Le « corridor méditerranéen » est à la rencontre d'un projet ferroviaire espagnol datant des années 1920 et d'un projet inscrit dans la planification des réseaux transeuropéens de transport depuis les années 1990. La thèse s'intéresse à l'axe littoral qu'il désigne, comprenant des villes, des activités et un ensemble d'infrastructures. Elle part du constat que le corridor méditerranéen doit être inscrit dans un contexte territorial multiple. Il est pérenne par son inscription dans le temps long de la construction et de l'aménagement du territoire espagnol, mais changeant dans la temporalité politique de la planification et de ses phases successives. Enfin, il est multiscalaire par son inscription dans le jeu institutionnel et ses impacts territoriaux. Nous faisons l'hypothèse qu'en Espagne, le corridor méditerranéen interagit avec les enjeux politiques et économiques, au point qu'il ne peut être considéré comme un simple projet de transport (pour l'heure non matérialisé par une infrastructure), mais doit être envisagé dans sa dimension politique. À la croisée de ces enjeux, la thèse prend le parti d'une approche territoriale – à la différence de la majorité des travaux – qui permet d'aborder le corridor méditerranéen sous l'angle de son inscription dans l'espace, en prenant en compte aussi bien les problèmes économiques et politiques qui façonnent le territoire du corridor en amont que les implications du projet sur ce territoire à toutes les échelles en aval. La thèse pose deux questions centrales. Il s'agit d'abord de comprendre comment un objet, au départ un projet d'infrastructures inscrit dans un processus de prise de décision en matière d'aménagement du territoire, devient un facteur puissant de recomposition des jeux d'acteurs et de réinterprétation des paradigmes de l'aménagement des territoires à toutes les échelles. Il s'agit ensuite d'interroger la dialectique entre les différents échelons institutionnels d'une part et entre les différentes échelles territoriales (européenne, nationale, régionale et locale) d'autre part. L'inscription du projet dans les territoires peut se faire à travers différentes formes de territorialisation, matérielles ou immatérielles, de la construction d'équipements ferroviaires à la modification du jeu des acteurs dans un territoire donné autour du projet de corridor. On assiste à un double processus de politisation des intérêts locaux par l'action des associations d'entreprises au niveau régional, et de dépolitisation du débat sur le corridor par le biais de l'européanisation du projet. En s'appuyant sur un ensemble de méthodes fondées principalement sur la pratique d'entretiens, ainsi que sur l'étude des documents de planification et des manifestations du corridor méditerranéen dans le débat public, cette thèse a permis de faire émerger trois résultats principaux. Premièrement, par sa plasticité, le corridor méditerranéen devient un objet politique : il désigne à la fois un projet d'infrastructures aux caractéristiques mouvantes et un catalyseur d'intérêts de nature différente autour d'un objectif commun. Deuxièmement, le corridor méditerranéen, parce qu'il correspond à des représentations territoriales et à des objectifs différents, ne peut s'incarner comme infrastructure car sa matérialité lui ôterait son statut de fédérateur d'intérêts et détruirait l'unité fragile créée autour de sa revendication. Cette impossibilité du corridor méditerranéen est ce qui en fait un excellent médiateur entre les différents acteurs. Troisièmement, le corridor méditerranéen est au centre d'un processus multiple de territorialisation, répondant aux trois sens de ce terme : il apparaît comme un avatar, parmi d'autres, des grandes structures spatiales européennes et espagnoles ; il est un facteur d'émergence de structures territoriales nouvelles par ses impacts sur les territoires locaux ; il permet la recomposition du jeu des acteurs autour d'un projet, dans une réalité spatiale qui lui est propre