Thèse soutenue

Hypothèse répressive et généalogie de la morale : Foucault-Lacan

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Auteur / Autrice : Sandrine Marsaudon
Direction : Muhamedin Kullashi
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Philosophie
Date : Soutenance le 12/10/2015
Etablissement(s) : Paris 8
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Pratiques et théories du sens (Saint-Denis, Seine-Saint-Denis ; 1992-....)
Partenaire(s) de recherche : Equipe de recherche : Laboratoires d'études et de recherches sur les logiques contemporaines de la philosophie
Jury : Président / Présidente : Pierre Vermeren
Examinateurs / Examinatrices : Muhamedin Kullashi
Rapporteurs / Rapporteuses : Howard Caygill, Guillaume Le Blanc

Résumé

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On croit connaître les critiques de Foucault sur la psychanalyse, et l’on va jusqu’à parler de l’antiphilosophie de Lacan. Pourtant, il suffit de s’intéresser à leur œuvre respective pour observer que chacun d’eux n’ont pas cessé d’utiliser abondamment et d’une façon constante les catégories de la discipline « adverse » pour les faire jouer dans leur propre domaine. Ce travail de thèse repose sur l’idée d’un dialogue possible et heuristique, entre le philosophe et le psychanalyste. Un travail qui suppose qu’on ne s’attache ni à un aspect trop particulier ni à un aspect trop général de leurs pensées. Car ce qui nous intéressait au préalable était de trouver un angle de vue qui puisse traduire un (ou des) mouvement(s) commun(s) à leur pensée.Cet angle de vue, ce(s) mouvement(s), nous les avons trouvés dans leur manière commune d’interroger la modernité au travers d’une généalogie la morale, à laquelle ils s’exercent l’un et l’autre : Foucault dans les trois volumes de l’histoire de la sexualité (1974/ 1984), Lacan dans le séminaire VII de la psychanalyse (1959/1960). Deux généalogies qui apparaitront en définitive comme un prétexte à interroger la situation de la philosophie et celle de la psychanalyse de notre temps.Lacan et Foucault débutent – rétrospectivement pour Foucault - leur généalogie comme chaque éthicien avant eux à partir du problème du plaisir qui s’institue en opposition avec la réalité. C’est à partir du plaisir que s’élabore une éthique du désir pour Lacan et une éthique du souci de soi chez Foucault. Leur éthique se fait pourtant d’abord en sens opposé. Lacan critique la dimension du Bien antique aristotélicien, parce que ce bien dissimule la jouissance impossible qui lui est corrélative. Foucault lui, au contraire, montre que l’antiquité a su s’intéresser au plaisir et le problématise sous la dimension d’un véritable mode de vie. Pourtant on verra que, in fine, leur chemin converge vers la nécessité fondamentale pour notre modernité de distinguer le plaisir de la jouissance. Cette distinction se fait en montrant que le désir et le souci de soi, en tant qu’éthiques, reposent sur des ascèses et des mécanismes liés à la sublimation. Contrairement à l’ascèse chrétienne qui valorise la disparition du plaisir, l’ascèse courtoise de Lacan et l’ascèse de l’amour grec pour le garçon aux yeux de Foucault ouvrent sur la dimension d’un plaisir qui s’oppose à la jouissance. En déclinant le Bien antique aux services des biens, Lacan s’associe en quelque sorte à Foucault pour montrer que la stratégie du pouvoir moderne consiste en réalité à instrumenter cette aspiration à la jouissance. La critique de l’utilitarisme intervient à cet endroit mais en instituant la dimension du langage au cœur des phénomènes humains, cette doctrine montre aussi l’importance de la fiction pour dire ce qu’est en vérité le sujet et la positivité du désir qui le conditionne.Si l’hypothèse de la répression de la sexualité est la thématique de départ de cette thèse et consiste à découvrir comment les positions du philosophe et celles du psychanalyste dans ce domaine peuvent se répondre en écho, la question est aussi de savoir ce qu’est un sujet, et comment on peut envisager la possibilité, pour ce sujet, d’une éthique moderne. Nous avons pu vérifier en particulier combien dans ce cadre, l’assertion de Lacan, que le plaisir puisse agir comme un frein à la jouissance, prend effectivement son sens plein dans le trajet et le tournant pris par Foucault, au fil de la Volonté de Savoir et des deux autres volumes que sont l’Usage des Plaisirs et le Souci de Soi.