Thèse soutenue

Bolaño ou la réécriture du mythe de l'écrivain maudit : Estrella distante, La pista de hielo et Amberes
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Auteur / Autrice : Santiago Guevara
Direction : François Gramusset
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Etudes ibériques et ibéro-américaines
Date : Soutenance le 15/12/2015
Etablissement(s) : Université Grenoble Alpes (ComUE)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale langues, littératures et sciences humaines (Grenoble ; 1991-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire Arts et pratiques du texte, de l’image, de l’écran et de la scène (Grenoble)
Jury : Président / Présidente : Isabelle Krzywkowski
Rapporteurs / Rapporteuses : Caroline Lepage, Martha Pardo Segura

Mots clés

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Mots clés contrôlés

Résumé

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Dans les trois ouvrages étudiés Estrella Distante (1996), La pista de hielo (1993) et Amberes (2002) nous révélons la présence, parfois patente, parfois latente, du mythe de la malédiction. Notre étude rend compte d’une lecture à la lumière du mythe littéraire moderne de l’écrivain maudit. L’évolution de l’œuvre de Bolaño, montre que depuis le début le mythe de la malédiction lutte pour prendre une place centrale dans son œuvre.Un seul motif reste constant, inamovible, dans les trois romans en particulier et dans l’œuvre entière en général : l’héroïsme. Nous voyons dans cette valeur inaltérable du mythe de l’écrivain maudit chez Bolaño, le cœur de son éthique littéraire. L’héroïsme du poète maudit n’est pas associé à l’idée romantique d’une mission personnelle fondamentale mais plutôt à la valeur d’incorruptibilité. Les deux mythèmes PURETE-DETRESSE suscitent les deux motifs mythiques INGENUITE-MARGINALITE. Ceux deux motifs, filtrés par le temps et l’écriture conduisent à l’HEROISME et à l’INCORRUPTIBILITE, valeur qui définit le poète maudit dans l’ensemble de l’œuvre.La réécriture de ce mythe n’est pas sans conséquences dans l’univers de la réception. Bolaño se crée dans ses textes une image de lui-même qui prospère ensuite dans l’inconscient collectif ; son image devient l’archétype de l’écrivain latino-américain contemporain. La nouveauté de l’œuvre de Bolaño est d’avoir su placer la figure du poète maudit au cœur de son univers littéraire. Comme il est courant dans la reprise d’un mythe par un écrivain, Bolaño vise par sa réécriture un modèle à vocation universelle, sans que pour autant sa vie soit l’original ou la copie de ce modèle. L’image archétypale de l’homme Roberto Bolaño repose sur un univers symbolique de représentations qui ont un lien intime avec la malédiction.Bolaño insiste sur une autre forme de malheur, la rébellion, la révolte du maudit. Elle a été l’une des premières abordée dans la réception de son œuvre, et traduite comme une tendance antisystème. Bolaño est donc perçu comme un provocateur net, chose qui est absolument vraie. Cependant, c’est à travers la figure du maudit que la révolte littéraire s’effectue vraiment. En s’attaquant aux institutions littéraires, le poète renonce à l’appui institutionnel et déclare conquérir son indépendance à l’égard des pouvoirs littéraires. Pour chercher à être indépendant des pouvoirs littéraires il faut nécessairement en être d’abord dépendant ! Si le poète-type de Bolaño n’écrit presque pas, ou du moins pas comme il devrait le faire en tant qu’écrivain, de quelle sorte d’indépendance littéraire est-il question ? Cela pose un problème de fond celui de la vie comme œuvre (ce fut le cas pour le dandysme), et comme œuvre littéraire. Si la vie peut devenir littérature et si l’existence peut se changer en œuvre d’art, c’est à cette transformation que le poète bolanien se donne corps et âme. Faire de sa vie un objet littéraire est donc la tâche curieuse et très originale que s’impose le poète maudit chez Bolaño.En réécrivant le mythe du poète maudit, Bolaño a ouvert la voix à une nouvelle manière de voir la littérature et d’en faire. Ce mythe, bien connu en Europe depuis Villon jusqu’à Houellebecq, a été ravivé dans l’œuvre de Bolaño, en même temps qu’il a été introduit dans l’imaginaire de la littérature hispano-américaine, pour devenir aujourd’hui un symbole à double effet : consommation de masse d’une icône ou chemin offert au public vers le sens caché de l’expression.