Thèse soutenue

La place et le rôle du romanesque dans la poétique d'Émile Zola

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Auteur / Autrice : Assane Faye Ndiaye
Direction : Chantal MassolBoubacar Camara
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Littératures française et francophone
Date : Soutenance le 20/10/2015
Etablissement(s) : Université Grenoble Alpes (ComUE) en cotutelle avec Université de Saint-Louis (Sénégal)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale langues, littératures et sciences humaines (Grenoble, Isère, France ; 1991-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Traverses 19-21 (Grenoble ; 2003-2014)
Jury : Président / Présidente : Issa Ndiaye
Examinateurs / Examinatrices : Catherine Mariette-Clot

Mots clés

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Résumé

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Les Rougon-Macquart, immense composition littéraire, comportant vingt romans, est le témoignage le plus saillant de la poétique zolienne du récit. Cette poétique trouve son fondement dans les principes directeurs du Naturalisme qu'Émile Zola, maître à penser de ce courant, a élaborés dans ses différents écrits, comme théoricien et comme critique littéraire. Parmi les caractéristiques que Zola attribue au récit naturaliste se trouve un refus du recours au « romanesque » dans la poétique de l'œuvre. L'adjectif « romanesque », certes, est forgé sur le radical de « roman ». Mais, pris sous sa forme substantive, le romanesque entretient avec le genre du roman des relations complexes ainsi que l'a montré, par exemple, Jean-Marie Schaeffer. Il convient de rappeler, avec lui, l'origine linguistique du terme et ses évolutions, ainsi que le glissement sémantique qui propulse la notion hors de son contexte littéraire. Pour cerner cette notion, il n'est pas inutile de la replacer, comme il le fait, dans un contexte anglo-saxon : car l'anglais, on peut le souligner, distingue entre romance, que l'on peut traduire en français par « roman romanesque », et novel, qui est l'équivalent de « roman à visée réaliste ». « Romanesque » possède, ainsi, une double signification : il désigne ce qui est relatif au roman en tant que genre, mais aussi ce qui est propre au roman comme romance. En ce sens, il est devenu, au fil des siècles, péjoratif : il renvoie en effet à une peinture de passions idylliques, conduites à leurs extrêmes, jusqu'à frôler l'invraisemblable. On peut ainsi comprendre que des théoriciens du roman, notamment au XIXe siècle – moment où le genre aspire au sérieux et développe des esthétiques réalistes – s'en prennent à quelques-uns de leurs prédécesseurs, leur tenant grief de ne pas assez peindre la réalité des choses, de proposer une représentation idéalisée de la vie, dans laquelle le bon triomphe du mauvais, les nobles sentiments prévalent sur les mauvaises pensées et où la représentation des passions atteint des proportions incommensurables.Ainsi, si nous convoquons les principes du Naturalisme appliqués dans la poétique du récit de Zola, nous nous rendons compte que le romanesque, dans sa conception thématique, (on entend par là la peinture idyllique des passions et du monde) et non générique, est écarté dès les prémices du courant. Zola fustige en effet le comportement de ses contemporains et de ses prédécesseurs à qui il reproche de perdre le lecteur dans des rêves puérils, dans une peinture trop abstraite de la vie. Le XIXe siècle, qui a vu l'affirmation de la science et de ses méthodes, a conduit Zola à une nette rupture avec les poétiques antérieures du roman. Il ressort, dès cet instant, que Zola ne veut plus faire dans les récits qui ont bercé son adolescence ; il entend se démarquer de ces fantômes du rêve, de ces romans des dieux et des héros, personnages d'une aspiration irréalisable parce que trop abstraite. Son dessein avoué, il s'arme de la science et de ses méthodes d'analyse pour aller à conquête d'une représentation juste et véridique de la réalité dans l'œuvre littéraire, le roman en l'occurrence. Et puisque, en outre, « le romanesque » est marqué par une axiologisation négative très forte dans sa signification non littéraire et dans laquelle émergent « des connotations de sentimentalité, de sensiblerie, voire de kitch », il se voit automatiquement disqualifié par la conception zolienne du roman.On peut néanmoins s'interroger sur la réalité de l'éviction du romanesque dans le récit et la fiction zoliennes. Peut-on imaginer une poétique du roman qui parvienne à se dégager totalement des schémas et d'une topique constitutifs d'un genre à ses origines, et véhiculés par une tradition séculaire ? Le romanesque ne fait-il pas retour dans l'œuvre de Zola ? Ce sont ces écarts qui se font jour entre la poétique réelle de l'œuvre et les déclarations théoriques de l'auteur que nous avons étudiés dans cette thèse.