L’islam au Gabon : socio-anthropologie politique d’une minorité confessionnelle
Auteur / Autrice : | Doris Ehazouambela |
Direction : | Jean-Pierre Dozon |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Anthropologie sociale et ethnologie |
Date : | Soutenance en 2015 |
Etablissement(s) : | Paris, EHESS |
Mots clés
Résumé
La présente étude porte sur l’islam au Gabon en milieu urbain. Cette étude entend montrer que l’islam, contemporain de la colonisation, en tant que phénomène essentiellement urbain, fait aujourd’hui partie de l’environnement social, religieux, économique et politique gabonais. Considérée comme une religion socialement minoritaire, et pratiquée de surcroît par une population surtout issue de l’immigration, l’islam occupe pourtant, eu égard aux conversions, la deuxième place parmi les religions du Livre au Gabon. Cette dynamique spécifique de l’islam au Gabon permet d’appréhender la réalité sociale non seulement sous l’aspect des modèles, des schèmes, qui la régissent en partie, mais aussi sous l’aspect des pratiques, notamment religieuses qui révèlent que la société gabonaise est constamment en voie de se faire. Ce qui donne à voir comment l’islam structure les situations historiques et l’organisation sociale, ainsi que les décalages existant entre les aspects « officiels » de la société et les pratiques sociales. C’est donc une religion minoritaire qui a accompli son institutionnalisation en construisant sa singularité sur le plan local, aidée par des membres de la « société politique » convertis à la foi de Mahomet : les Mamadou. Ces derniers considèrent l’islam comme un autre de leurs domaines de gestion, susceptible de renforcer les pouvoirs du bloc hégémonique. De ce fait, cette conversion à l’islam du président El Hadj Omar Bongo-Ondimba et de son entourage, et surtout sa longévité au pouvoir, ont institué un imaginaire au sein de la société gabonaise. C’est-à-dire comme lieu de la construction de son histoire sociale, de l’économique et du politique, avant et après l’indépendance du pays. Ainsi, l’islam au Gabon est pour la « société politique » un des éléments participant au pouvoir politique et économique, il est constitutif de la dialectique de l’accumulation des « puissances » du règne du président Omar Bongo-Ondimba. En inscrivant les populations gabonaises dans des contingences nouvelles, notamment religieuses, la modernité africaine a tendance à substituer le lignage, le clan par la communauté nationale, l’Eglise ou la Mosquée. On se trouve alors face à une déparentélisation qui a pour conséquence une accentuation des rapports sociaux et politiques. Ainsi, par le fait de la conversion des déparentélisés, les Mamadou et les Makaya, l’islam reconfigure et recompose les positionnements et les rapports sociaux et politiques au sein de la société gabonaise. Dès lors, l’islam au Gabon participe à ce dispositif de pouvoir dit « Pouvoir fantôme » qui opère à la fois sur la base de la visibilité et de l’invisibilité.