Thèse soutenue

La condition peule. Autour de la vache : nomade ou sédentaire ? Différences et similitudes de pratiques et de représentations, selon qu’on est l’un ou l’autre. Étude comparative de communautés de Guinée et du Tchad
FR  |  
EN
Accès à la thèse
Auteur / Autrice : Yassine Kervella-Mansaré
Direction : Sergio Dalla Bernardina
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Ethnologie
Date : Soutenance le 06/11/2015
Etablissement(s) : Brest
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences humaines et sociales (Rennes)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de recherche bretonne et celtique (Brest, Finistère)
Jury : Président / Présidente : Philippe Pesteil
Examinateurs / Examinatrices : Philippe Pesteil, Laurence Hérault, Riccardo Ciavolella, Alessandra Giuffrida, René-Paul Desse
Rapporteurs / Rapporteuses : Laurence Hérault

Résumé

FR  |  
EN

Actuellement estimés à environ 8 millions d'individus, les Peuls constituent un ensemble de populations réparties sur une vingtaine de pays de la zone sub-saharienne. À partir d'une origine qu'ils affirment commune et qui, selon l'hypothèse la plus couramment admise, se situerait en Égypte, ils auraient connu de multiples mouvements migratoires, mais en conservant dans tous les cas le souci d'organiser leur vie sociale autour de l'élevage bovin. Mieux qu'un symbole, la vache leur apparaît comme l'animal fondateur de leur personnalité ethnique. On remarque cependant des différences notables selon qu'ils sont nomades, sédentaires ou semi-nomades. Les dispersions connues au cours des siècles, pour des raisons diverses (entre autres : économiques, politiques, climatiques), ont eu pour conséquences des écarts culturels parfois profonds. En procédant à une comparaison des sédentarisés en Guinée, sur les plateaux du Fuuta-Jaloo, et des nomades et semi-nomades du Tchad, il s'agit de mettre en relief certaines de ces différences et, par contraste, de discerner les points communs qui pourraient révéler un patrimoine unique. Dans le cas particulier des sédentaires devenus citadins et ayant perdu pour cette raison toute implication dans une activité pastorale, la vache reste au centre de leur imaginaire. Elle persiste à influencer leurs discours par de nombreuses références dans le jeu des métaphores, dans les formules de politesse, dans la valorisation des conduites, etc. On le vérifie autant par l'observation de la vie quotidienne que par les initiatives de certains intellectuels Peuls qui ont créé des associations pour promouvoir ce patrimoine à la fois dans leur pays de résidence et à l'international, comme par la création de sites Web. Ils ont même tendance à gommer ou atténuer fortement les différences apparues historiquement entre les groupes, voire à minorer des métissages survenus de génération en génération, pour proposer comme une sorte de standard uniforme. Dès lors, ils renvoient eux aussi à un lointain passé, mais parfois avec des partis-pris idéologiques qui participent d'un militantisme politique ou religieux, l'intention avouée ou non étant de définir une « nation peule » qui, bien que fragmentée dans plusieurs États, gagnerait à prendre conscience de sa singularité en Afrique. Au fil de l'enquête de terrain, l'attention est portée autant sur des données événementielles caractéristiques, comme celles qui scandent les existences individuelles et collectives (naissance, mariage, décès), que sur des données organisationnelles (exercice de l'autorité, coopération des genres au sein de la famille et du clan, classes d'âge, interactions économiques, gestion du bétail, conception de l'espace et du temps, prédéterminations religieuses, etc.).Gagnent également à être précisées les influences exercées sur les Peuls par les autres populations côtoyés au gré de leurs déplacements ou de leur fixation sur un territoire, influences provoquant l'acquisition durable de manières ou de techniques. Nonobstant les emprunts linguistiques, elles sont flagrantes dans la construction de l'habitat, temporaire ou définitif, et dans le choix de l'habillement. Jusqu'à une époque récente, les peuls ne sont pas réputés pour avoir un artisanat propre. Les choix qu'ils font pour modifier leurs rapports aux objets fabriqués en dehors d'eux répondent à des besoins dont il s'agira d'exposer la nature. Par exemple, de nos jours, l'emploi du téléphone portable accélère considérablement les prises de décision lors des transhumances. Au final, sachant l'omniprésence de la vache dans la culture peule, quelles que soient l'évolution du contexte matériel et social, il conviendra de clarifier la fonction structurante qu'elle exerce donc à la fois sur la plupart des pratiques et sur les représentations symboliques. Elle polarise en quelque sorte la production culturelle revendiquée comme l'héritage d'une tradition multiséculaire. […]