Thèse soutenue

Le "cœur, le talent et la doctrine" de Pietro Giordani dans la formation de Giacomo Leopardi
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Auteur / Autrice : Mario Fernando Franco
Direction : Rawdha Zaouchi-RazgallahMyriam Carminati
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : ETUDES ROMANES spécialité Etudes italiennes
Date : Soutenance le 09/12/2014
Etablissement(s) : Montpellier 3 en cotutelle avec Université de la Manouba (Tunisie)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale 58, Langues, Littératures, Cultures, Civilisations (Montpellier ; ....-2014)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : LLACS-Langues, littératures, arts et cultures du sud (Université Paul-Valéry, Montpellier 3) - Langues- Littératures- Cultures des Suds / LLACS
Jury : Président / Présidente : Ahmed Somaï
Examinateurs / Examinatrices : Rawdha Zaouchi-Razgallah, Alfredo Luzi, Bernard Urbani
Rapporteurs / Rapporteuses : Silvia Finzi, Antonello Perli

Mots clés

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Mots clés contrôlés

Mots clés libres

Résumé

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La problématique de cette thèse, à savoir la présence simultanée du trinôme "doctrine-esprit-cœur'' dans la relation Giordani-Leopardi a révélé, que le legs le plus important de ce rapport doit être recherché dans ses aspects affectifs plus que dans une filiation de nature littéraire ou doctrinale. Giordani révèle à Leopardi une tradition de pensée "noble" par rapport à la monotonie du conformisme à travers lequel s'était développé le rapport entre intellectuels et pouvoir. À côté de la "noblesse" il y a aussi la composante de la "modernité", grâce à laquelle Giordani fut le promoteur d'idées innovantes, accordant aux jeunes gens une grande confiance et poussant à l'extrême les conséquences d'une "nouvelle" conception de la réalité comme un langage apte à l'interpréter même dans les traits les plus secrets et incertains de l'esprit. On peut alors affirmer qu'un tel langage "moderne" est celui qui a été défini comme le "langage du cœur" et dont, pour une partie considérable, l'avènement a été rendu possible grâce à la correspondance entre les deux amis. Les possibles parallélismes existentiels en présence concourent à créer ce ressenti commun qui se transmet dans la dimension littéraire et culturelle. La communauté d'idées et la syntonie qui émergent à partir de 1817 et qui perdurent jusque dans les années 1820 va progressivement diminuer en intensité sans toutefois s'éteindre totalement. Il est indubitable que lorsque Leopardi réussit finalement à s'éloigner de Recanati, la tension si pressante à l'égard de son ami (sa fenêtre sur le monde) se relâche. Cela est humainement explicable par le fait que, comme Leopardi avait enfin l'occasion d'élargir son propre horizon d'une manière indépendante, il ressentait moins le besoin de le faire par le biais de sa relation avec Giordani. C'est dans la dimension affective que doit être recherchée la vocation originale de ce rapport, même sous l'aspect de l'engagement civil et littéraire: le don de l'amitié et l'attention fraternelle réciproque, même si, chez Giordani, nous pouvons parler d'une attention "paternelle", ne sont pas des oripeaux qui viseraient à embellir ou à enrichir le rapport entre les deux lettrés, mais ils constituent plutôt la sève même dont se nourrit un tel rapport. Leopardi ne voit pas seulement en Giordani un mentor plus âgé et plus mûr auquel il pouvait confier ses propres secrets et ses pensées les plus intimes. À l'inverse, tous deux ressentent la tension qui les pousse vers une pensée "rebelle", une dimension "autre" de la réflexion humaine par rapport aux "coordonnées" réactionnaires et à l'excessive dérive rationaliste de la raison. Cette rébellion les rapproche et leur permet de s'inscrire dans la lignée la plus pure des "anciens" qui étaient non seulement porteurs de ces valeurs à partir desquelles mesurer les tensions intellectuelles et morales, mais aussi dépositaires de cette étincelle du "doute" générant une vision beaucoup plus complexe de l'individu que ni le rationalisme, ni le psychologisme romantique, ne pouvaient percevoir avec clarté. L'éclosion et l'évolution de cette syntonie particulière apparaissent comme une très belle expérience existentielle dont témoignent leurs lettres. Cette expérience est celle de la rencontre entre deux personnalités, par ailleurs assez "difficiles" sur le plan du caractère : c'est dans la volonté réciproque de se soutenir, de se chercher, de s'aiguillonner qu'il est possible de comprendre ce qu'a pu signifier une telle amitié, surtout pour le jeune Leopardi désireux d'un ami véritable dans la solitude de Recanati. Vie et littérature se mêlent, c'est pourquoi de même que l'accueil d'une pensée, une réflexion, un écrit de l'un et de l'autre, s'accompagnent toujours d'une joie de l'esprit réciproque, de même sont partagées les heures de tristesse, de désolation, de mélancolie, de doute et de peur. Le tout en vient à former l'une des expériences les plus touchantes du panorama littéraire italien de tous les temps.