Tremblement de terre du 12 janvier 2010 en Haïti : Des traumatismes à la résilience
Auteur / Autrice : | Jude Mary Cénat |
Direction : | Daniel Derivois |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Psychologie |
Date : | Soutenance le 24/03/2014 |
Etablissement(s) : | Lyon 2 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Éducation, psychologie, information et communication (Lyon ; 2007-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Centre de recherches en psychopathologie et psychologie clinique (Bron, Rhône ; 1993-...) |
Jury : | Président / Présidente : Marie Anaut |
Examinateurs / Examinatrices : Bernard Chouvier, Yves Lecomte | |
Rapporteur / Rapporteuse : Thierry Baubet, Yoram Mouchenik |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Mots clés libres
Résumé
Ce travail financé par l’Agence Nationale de Recherche (Projet ANR-10-HAIT-002 RECREAHVI : Résilience et Processus Créateur chez les Enfants et les Adolescents Haïtiens Victimes de Catastrophes Naturelles), porte sur les traumatismes et aménagements psychiques du peuple haïtien pour se reconstruire suite au séisme de janvier 2010 qui a ravagé plusieurs villes du pays et tué environ 2,5% de la population.Des études réalisées auprès des survivants suite à des évènements similaires dans d’autres pays ont montré d’importants effets traumatiques sur les populations. D’autres études ont aussi montré que les personnes touchées par des catastrophes (naturelles) ne présentent pas toutes des traumatismes et qu’au contraire, certaines arrivent à trouver les ressources nécessaires pour se reconstruire. La présente recherche avait pour objectifs d’étudier les conséquences traumatiques du séisme dans la population haïtienne et les stratégies qu’elle met en place pour y faire face et se reconstruire. Elle s’est basée sur une approche complémentariste articulant non seulement théories psychodynamiques des traumatismes et le modèle du Trouble de Stress Post-Traumatique (TSPT), mais aussi méthodes quantitatives et qualitatives, tout en tenant compte des particularités culturelles de l’expression traumatique et de la résilience.Un groupe de 872 enfants et adolescents (dont 56,30% de filles) avec un âge moyen de 14,91 (ET = 1,94) et 1355 adultes (dont 48,71% de femmes) avec un âge moyen de 31,57 années (ET = 14,42) ont été évalués à l’aide de questionnaires concernant les évènements de vie marquants, l’exposition traumatique, les symptômes de la détresse péritraumatique, du TSPT, de la dépression, le soutien social et la résilience. Des données qualitatives ont ensuite été recueillies à l’aide d’entretiens cliniques et de méthodes projectives (Rorschach et D10) auprès d’une vingtaine de sujets. Six études de cas choisis pour leurs particularités (amputation, dynamique du transfert et du contre-transfert) sont présentées dans ce travail.Deux ans et demi après le séisme, les résultats montrent des taux de prévalence élevés des symptômes du TSPT et de la dépression (respectivement 36,96% et 46,21% chez le groupe enfant/adolescent et 36,75% et 25,98% chez les adultes). Ils montrent également que le jeune âge, l’âge avancé, le sexe féminin, le chômage, le bas niveau d’éducation et les difficultés économiques sont les principaux facteurs de risque. Le degré d’exposition et la détresse péritraumatique sont les principaux facteurs prédicteurs des symptômes du TSPT et de la dépression. Les résultats de la phase clinique mettent particulièrement en évidence l’emboitement de traumatismes psychiques multiples qui s’expriment à travers des codes culturels, aux niveaux individuel, familial, communautaire et social.Cependant les résultats indiquent également que comparativement à d’autres pays ayant vécu des séismes similaires comme le Japon et la Chine, les enfants, adolescents et adultes haïtiens font preuve d’un niveau de résilience plus élevé à l’échelle de Resilience Scale traduite, validée et publiée en créole haïtien. Le soutien social étant le meilleur facteur prédicteur de la résilience, il a été observé que les survivants s’appuient sur un ensemble de tuteurs de résilience interconnectés comme la famille, l’école, les institutions religieuses et les réseaux associatifs entre autres pour se reconstruire. Tout en mettant en perspective un modèle baptisé « L’arbre de la construction de la résilience », l’ensemble des résultats montre la nécessité d’un accompagnement de la population avec la culture comme levier thérapeutique.