Les restes humains dans les musées : anthropologie et histoire des collections françaises (XIXe-XXIe siècle)
Auteur / Autrice : | Christelle Patin |
Direction : | Alban Bensa |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Anthropologie sociale et historique |
Date : | Soutenance en 2014 |
Etablissement(s) : | Paris, EHESS |
Mots clés
Résumé
Depuis les années 1990, les collections anthropologiques des institutions muséales constituées de restes humains sont l’objet de vifs débats. Les collections françaises n’y dérogent pas. Leur histoire est au cœur des discours et interroge l’appréhension de nouvelles pratiques. Cette thèse se propose de comprendre quelle histoire, son unicité ou pluralité, ainsi que les acteurs, les modalités et les enjeux de sa construction actuelle. Elle cherche également à confronter cette lecture historiographique à une reconstitution précise de l’histoire scientifique et sociale de ces collections françaises singulières, du moment de la récolte à aujourd’hui. Le choix méthodologique a été de privilégier la micro-histoire qui permet une lecture processuelle et configurationnelle en donnant aux acteurs toutes leurs voix. L’établissement de biographie culturelle de ces « corps-objets » a permis de suivre et d’appréhender les dialectiques sur un temps long ainsi que d’analyser les formes de dépendance entre passé et présent. Le choix s’est porté sur les restes anatomiques de Saartjie Baartman, dite la « Vénus hottentote », et le crâne du chef kanak Ataï, tous deux conservés au Muséum national d’histoire naturelle. Ce travail repose sur l’analyse de nombreuses archives inexplorées et pour la partie contemporaine, sur celle des débats et textes législatifs, muséologiques, médiatiques et suivis de scientifiques et conservateurs. La recherche a mis en lumière les logiques de mise en exposition, processus allant de la récolte des cadavres, leur transport puis transformation en objet scientifique, à leur inscription dans des espaces muséographiques. Elle s’achève par la construction de leur restitution. Cet écrit tente ainsi de synthétiser les diverses facettes des débats et des enjeux moraux et politiques dont furent l’objet, directement ou indirectement, Saartjie Baartman et Ataï. Par un jeu d’échelles, il montrera que le destin post-mortem de ces deux personnes fut complexe et multiforme, contrairement aux lectures contemporaines mémorielles, pénétrées de réduction ou d’anachronisme. Elle analyse aussi les hésitations et compositions, en retour, des scientifiques. Finalement, les restes humains des musées se refusent à toute catégorisation simple.