Flore nasale microbienne et colonisation par Staphylococcus aureus
Auteur / Autrice : | Anne-Sophie Alvarez |
Direction : | Jean-Louis Gaillard |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Bactériologie |
Date : | Soutenance en 2013 |
Etablissement(s) : | Versailles-St Quentin en Yvelines |
Ecole(s) doctorale(s) : | Ecole doctorale des Génomes aux organismes (Versailles2000-2015) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Physiopathologie et diagnostic des infections microbiennes (EPIM) |
Résumé
Le portage nasal de Staphylococcus aureus – en particulier le portage « permanent » – joue un rôle clé dans l'épidémiologie et la pathogenèse des infections dues à cette espèce. Pour réussir un tel processus de colonisation, S. Aureus doit faire face à la flore microbienne « résidente », qui pourrait avoir un « effet barrière » peu exploré jusqu’alors. Dans ce contexte, l'objectif général de ce travail a été d’étudier les relations entre colonisation nasale par S. Aureus et flore bactérienne résidente, en essayant de déterminer plus spécifiquement si certaines espèces commensales pouvaient protéger et/ou être prédictives d’une colonisation permanente par S. Aureus. Nous avons réalisé une étude bactériologique longitudinale de patients hospitalisés en médecine physique et de réadaptation (MPR), une population présentant de multiples facteurs de risque d’acquisition de S. Aureus. Les patients bénéficiaient à leur admission d’un dépistage nasal de S. Aureus sensible (SASM) et résistant (SARM) à la méticilline, et les patients négatifs étaient suivis pendant un minimum de 13 semaines avec prélèvement nasal hebdomadaire. La flore nasale était analysée qualitativement et quantitativement. Les isolats de S. Aureus étaient caractérisés par « spa-typing » en collaboration avec la société Genoscreen (Lille). Dans une première partie, nous avons étudié les flores nasales de 50 patients ayant un dépistage de S. Aureus positif à l’admission versus 53 patients négatifs. Un dépistage négatif était significativement associé à un nombre d'espèces résidentes plus élevé (nombre moyen 4 versus 3 en cas de dépistage positif ; p = 0,0021) et à un isolement plus fréquent de Corynebacterium accolens et de Staphylococcus haemolyticus (analyse univariée : p = 0,02 et 0,01, respectivement ; analyse multivariée : p = 0,01 pour les deux espèces). Dans la deuxième partie de notre travail, nous avons étudié 27 épisodes d’acquisition de S. Aureus chez 24 patients négatifs à l’admission, ayant donné lieu ultérieurement à un portage permanent (n = 11) ou intermittent (n = 16). Le taux de S. Aureus au premier dépistage nasal positif était significativement plus élevé en cas de portage permanent (moyenne : 3,40. 105 UFC versus 2,04. 104 UFC en cas de portage intermittent ; p = 0,01). De façon intéressante, la présence de C. Accolens était associée à un risque plus faible d’observer un taux de S. Aureus > 5000 UFC (odds ratio [intervalle de confiance 95 %] : 0,085 [0,008-0,878], p = 0,039) ; aucun lien n’était observé avec la présence d’un spa-type t008 ou t777. Dans la dernière partie de notre travail, nous avons analysé par spa-typing 191 isolats de S. Aureus provenant de 191 patients hospitalisés dans trois centres de MPR géographiquement éloignés : Garches, Berck et Fouquières. Les 191 isolats représentaient 73 spa-types différents, parmi lesquels les plus prévalents étaient, comme observés en France, les spa-types t008, t777 et t002. Le spa-type t008 prédominait dans les trois centres et regroupait un tiers (26/78) de l’ensemble des souches de SARM identifiées. L’épidémiologie de Fouquières différait de celle de Garches et de Berck (pourcentage faible de souches t777 et relativement élevé de souches t571 et t2054), montrant l’existence d’un « effet centre ». Notre travail montre qu’une densité de colonisation initiale élevée par S. Aureus est prédictive de l’établissement d’un portage nasal permanent, et qu’il existe une relation inverse entre la densité de colonisation nasale par S. Aureus et la présence de C. Accolens, suggérant un possible « effet barrière » de cette dernière espèce.