L'émancipation du droit du travail calédonien
Auteur / Autrice : | Joanes Louis |
Direction : | Pascal Lokiec |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Droit privé |
Date : | Soutenance en 2013 |
Etablissement(s) : | Paris 13 |
Résumé
Le droit de l’Outre-mer est une discipline qui intéresse le plus souvent les spécialistes du droit public. L’intérêt des publicistes pour le droit outre-marin ne date pas d’aujourd’hui ; il a commencé dès le XVIIème siècle. Cela a permis à l’État métropolitain de mettre en place une politique de conquête des espaces ultra-marins. Très tôt, ces recherches, menées par les Professeurs Gonidec, Luchère et Lampué ont montré que la conception de l’État unitaire retenue par la France pour son organisation constitutionnelle rencontre des limites ; cela résulte de l’éloignement géographique de ces territoires, des spécificités historiques, culturelles et sociologiques des peuples autochtones. L’émancipation du droit du travail est un sujet qui semble être étranger au droit public ; en principe cette discipline relève du droit privé. Mais dans le contexte calédonien, ces affirmations devront être nuancées dans la mesure où l’on ne pourra pas exclure l’apport de la recherche des publicistes. En effet la Nouvelle-Calédonie, depuis l’accord de Nouméa du 5 mai 1998, est qualifiée d’entité sui generis et, à ce titre, rentre dans un processus d’indépendance. Celle-ci s’organise en deux temps. Dans la première phase de ce processus, l’État métropolitain transfère un ensemble de compétences aux autorités calédoniennes. Dans la seconde phase, un référendum d’autodétermination est organisé pour demander aux citoyens calédoniens s’ils souhaitent transférer ou non les compétences régaliennes (la défense, la politique étrangère, la justice) détenues par l’État à la Nouvelle-Calédonie. Dans le cadre de ce processus, l’article 21 de la Loi organique du 19 mars 1999 transfère à la Nouvelle-Calédonie une compétence exclusive dans le droit du travail ; le pouvoir métropolitain ne pourra plus participer à la détermination des normes applicables aux salariés dans le champ du droit du travail sur le territoire. Notre réflexion portera essentiellement sur le droit du travail en Nouvelle- Calédonie, mais ne se limitera pas exclusivement sur ce transfert ; car cette notion est trop restreinte pour qualifier cette nouvelle réalité institutionnelle. C’est la raison pour laquelle le terme d’émancipation est plus approprié et plus pertinent, car il permet de présenter les deux réalités que recouvre le droit du travail en Nouvelle-Calédonie. La première est l’autonomie qui conduit à une summa divisio du pouvoir normatif dans le droit local du travail. Dans ce système, le pouvoir métropolitain dispose d’une compétence exclusive pour fixer le Jus commune et le pouvoir local est titulaire du Jus proprium pour établir les règles se situant en dehors du Jus commune. La seconde est l’indépendance qui accorde une compétence exclusive à un pouvoir pour déterminer l’ensemble des normes opposables aux personnes rentrant dans son champ d’application. Dans le premier cas comme dans le second cas, deux problèmes se posent. Le premier concerne les incertitudes relatives à l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie. Cette situation se répercutera sur l’émancipation du droit du travail. Le second problème concerne la méthode. Est-il possible de recourir au droit comparé pour analyser le sujet alors que la Nouvelle-Calédonie, pour certains auteurs, est une partie intégrante de la République malgré son statut particulier prévu par l’article 76 de la Constitution ? Pour aborder le sujet, le droit comparé sera nécessaire car il existe bien des points de convergences entre le droit du travail métropolitain et calédonien ; toutefois des divergences subsistent. En conclusion, l’émancipation du droit du travail permet de mettre en lumière toute la complexité de ce territoire où la question de l’identité est très forte. Mais, c’est peut-être par le droit du travail que la Nouvelle-Calédonie trouvera la réponse tant pour son avenir institutionnel que pour son modèle social. En effet le droit du travail est une discipline qui oblige les oppositions à créer un dialogue permanent pour garantir la paix sociale dans l’entreprise et dans la société.