Jacques Henri Lartigue sous le regard de Richard Avedon : la question de l'oeuvre et de l'album photographique à partir de l'édition de Diary of a Century (1970)
Auteur / Autrice : | Marianne Le Galliard |
Direction : | Michel Poivert |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Histoire de l'art |
Date : | Soutenance le 14/12/2013 |
Etablissement(s) : | Paris 1 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Histoire de l'art (Paris ; 2000-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Equipe de recherche : Histoire culturelle et sociale de l'art (Paris ; 2006-....) |
Jury : | Président / Présidente : Sylvain Maresca |
Examinateurs / Examinatrices : Michel Poivert, André Gunthert | |
Rapporteur / Rapporteuse : Françoise Denoyelle |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
En 1970, sort la deuxième monographie sur la photographie de Jacques Lartigue, Diary of a Century. Elle est conçue par Richard Avedon, de renommée internationale en tant que photographe de mode américain pour Harper’s Bazaar et Vogue. Lartigue n’est toujours pas considéré alors, comme un véritable artiste. Grâce à Avedon, le public va découvrir pour la première fois une œuvre prolifique, ancrée dans la vie de l’artiste, avec des écrits personnels, des pages de carnet, des croquis et des images qui vont bien au-delà de la Belle Époque, période dans laquelle la photographie de Lartigue avait été alors cantonnée, suite à l’exposition au Museum of Modern Art en 1963. Pour Avedon, lorsqu’il commence à préparer le livre, il semble évident qu’il est temps que Lartigue soit reconnu pour son « œuvre totale », celle des albums, que Lartigue a composés toute sa vie durant presque soixante-dix ans. Lors de leur première rencontre en 1966, Lartigue a soixante-douze ans et Avedon quarante-trois. Une génération les sépare. Cet écart est essentiel dans notre étude. Il a fallu en effet une boucle, un cycle, de 1910 à 1970 pour que la photographie de Lartigue soit enfin consacrée en tant « qu’œuvre artistique ». C’est par ce renouvellement ou cette continuité des années dix durant les années soixante, dans ce contexte particulier, qu’une évolution de son œuvre se met en place. Nous déterminerons les nombreuses affinités entre le milieu d’Avedon, celui de la mode aux Etats-Unis dans les années soixante, et celui de Lartigue, en tant que jeune photographe mondain de la Belle Époque. Notre étude porte essentiellement sur la question de l’œuvre et de l’album photographique de Lartigue, sous le regard d’Avedon. Celui-ci pour la première fois, en tant que personne extérieure au cadre familial de Lartigue et photographe célèbre de surcroît consultera l’intégralité des albums, classés, mis en page et légendés par Lartigue. En véritable « metteur en page » en plus de « découvreur » des images de Lartigue, Avedon réussira à inscrire la production lartiguinienne dans l’histoire du XXe siècle, mais aussi dans l’histoire d’une vie. Il fera de lui un artiste, l’auteur d’une œuvre-monument, exceptionnelle traversant tout le siècle. La vision d’Avedon, avec Diary of a Century, va influer sur la réception critique de l’œuvre de Lartigue, perçu dès 1972, comme l’auteur d’albums de famille, composés d’images-icônes et non plus seulement un simple dilettante naïf et précoce issu d’un milieu bourgeois. Or, au même moment, Lartigue va transformer lui-même la structure de ses propres albums, en les démontant et remodelant. En sacralisant certains clichés, en les portant à nue comme de véritables chef-d’œuvres, Avedon va bouleverser, sans le savoir la vision de Lartigue des albums de famille, qui jusqu’ici gardaient vif un instant du passé. En cela, l’accumulation, la transformation et la modification continue des albums font œuvre. Sa vie durant, Lartigue va élaborer un véritable système d’écriture de soi. Ce ne sera plus le travail d’un amateur sérieux mais celui d’un artiste, élaborant un projet complexe et méthodique, une œuvre organisée et compliquée, questionnant le statut de l’image photographique entre l’icône et l’image multiple, entre l’image performée et authentique, entre art et amateurisme. Parler de cette lente évolution vers sa reconnaissance en tant qu’ « artiste-photographe », c’est aussi montrer à quel point, parce qu’il a œuvré de manière unique, il a su presque sans le vouloir, fabriquer une œuvre originale.