Thèse soutenue

Salaire minimum en Turquie : impact sur les inégalités, la pauvreté et l'emploi

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Auteur / Autrice : Gürdal Aslan
Direction : Jérôme Gautié
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences économiques
Date : Soutenance le 18/12/2013
Etablissement(s) : Paris 1
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale d'Économie (Paris)
Partenaire(s) de recherche : Equipe de recherche : Centre d'économie de la Sorbonne (Paris ; 2006-....)
Jury : Président / Présidente : Bernard Gazier
Examinateurs / Examinatrices : Jérôme Gautié, Gilbert Cette, Yannick L'Horty, Sophie Ponthieux

Mots clés

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Résumé

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Cette thèse porte sur la question du salaire minimum et de son rôle dans une société turque marquée par un faible taux d'activité, un secteur informel important, un exode rural massif, ou encore une organisation familiale élargie reposant souvent sur un seul apporteur de revenu. L'importance du salaire minimum est accrue dans la mesure où il est l'une des seules normes existant en matière de rémunération, compte tenu du champ très réduit des conventions collectives en Turquie. Le salaire minimum en Turquie est un salaire unique, national, obligatoire pour tous les secteurs d'activité, mensuel et fixé par une Commission tripartite; il s'applique, selon la législation turque, de façon relativement contraignante et uniformément sur tout le territoire, ce qui est loin d'être le cas dans la plupart des autres pays de l'OCDE. Il est l'objet d'une politique active qui a pu, dans l'histoire, poursuivre plusieurs objectifs (à certaines périodes, il fut clairement considéré comme un mécanisme de redistribution des revenus, à d'autres il fut utilisé pour limiter l'inflation ou encore pour relancer la consommation). Le salaire minimum turc est relativement élevé et concerne une part importante des salariés du secteur formel. En Turquie où la syndicalisation est faible, le salaire minimum constitue un rempart permettant de compenser l'absence ou la faiblesse de la négociation collective. Malgré l'existence de nombreux débats, notamment sur le niveau du salaire minimum et son mode de fixation, il ressort de notre enquête auprès des acteurs sociaux un fort attachement des travailleurs et des employeurs à ce dispositif. Dans ce contexte, la thèse propose de contribuer à l'évaluation de l'impact du salaire minimum en Turquie sur les salaires, les revenus, la pauvreté et l'emploi formel et informel. À l'aide de différentes techniques statistiques et économétriques à partir des micro-données de ménages et d'entreprises, nous montrons que les hausses du salaire minimum permettent de réduire les inégalités pour l'ensemble des salaires et la dispersion des salaires entre hommes et femmes et entre jeunes et adultes, en particulier en rehaussant les salaires du bas de la distribution. Ces évolutions plutôt favorables ne touchent pas les inégalités entre l'emploi formel et informel, où les écarts de salaire se creusent. Cet effet globalement positif sur les inégalités de salaires soulève la question de l'impact du salaire minimum sur les revenus des familles des travailleurs et ainsi, de celle du salaire minimum sur les inégalités de revenu et la pauvreté générale. Nos simulations montrent un faible effet des hausses du salaire minimum sur les inégalités de revenus et sur la pauvreté, ce qui s'explique par le grand nombre de travailleurs du secteur informel, de travailleurs indépendants, de travailleurs familiaux non rémunérés mais aussi de personnes sans emploi. En effet, les diverses caractéristiques du marché du travail turc contribuent à limiter le champ sur lequel le salaire minimum peut avoir un impact direct, puisque le taux d'activité est faible, le taux de chômage élevé et le travail informel encore important. L'organisation actuelle de la société turque, en particulier du marché du travail, ne permet pas au salaire minimum d'être un instrument efficace en matière de lutte contre les inégalités de revenu et contre la pauvreté. Nos résultats laissent penser que seules les évolutions du marché du travail susceptibles d'augmenter le taux d'activité et de réduire l'emploi informel permettraient au salaire minimum de contribuer à améliorer le niveau de vie en couvrant une plus large part de la population. Or nos travaux montrent que si le salaire minimum ne conduit pas nécessairement à des destructions d'emplois comme le suppose le modèle néoclassique, il est corrélé, en Turquie, à un développement de l'emploi informel non agricole.