Physiopathologie du virus Chikungunya : RAW264.7, un modèle d’infection des macrophages murins
Auteur / Autrice : | Shiril Kumar |
Direction : | Philippe Gasque |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Biochimie (Immunologie) |
Date : | Soutenance le 19/03/2013 |
Etablissement(s) : | La Réunion |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sciences, Technologies et Santé (Saint-Denis, La Réunion ; 2010-...) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Processus infectieux en milieu insulaire tropical (Saint-Denis, Réunion) |
Jury : | Président / Présidente : Pierre Roques |
Examinateurs / Examinatrices : Jean-Jacques Hoarau | |
Rapporteur / Rapporteuse : Pierre Roques, Philippe Desprès |
Mots clés
Résumé
Le virus Chikungunya (CHIKV) est un membre du genre Alphavirus de la famille des Togaviridae, transmis par les moustiques du genre Aedes. L'infection par le CHIKV provoque des troubles articulaires comme l'arthrite ou des arthralgies qui peuvent persister durant des années. Au cours des épidémies de 2005-2006, il a été démontré que le CHIKV pouvait persister dans les macrophages synoviaux pendant plusieurs mois voire des années. Les macrophages sont des cellules du système immunitaires innées qui jouent un rôle essentiel dans les processus inflammatoires, mais aussi dans d'autres activités pathologiques tels que l'angiogenèse. Des infections du système nerveux central par le CHIKV ont également été mis en évidence, démontrant une extension des caractères arthritogèniques de ce virus du groupe des « alphavirus de l‟ancien monde» à celui des « alphavirus du nouveau monde» causant des encéphalites. Notre hypothèse de travail est que les macrophages infectés, de façon persistante par le CHIKV, sont polarisés vers une réponse inflammatoire chronique qui peut être néfaste envers les autres cellules du tissu conjonctif. Pour élucider les mécanismes mis en jeu, nous avons développé un modèle d‟infection par le CHIKV d‟une lignée cellulaire de macrophage murin (RAW264.7) et analysé la réplication du virus et la réponse immunitaire innée engagée (production/libération de cytokines, facteurs de l‟angiogenèse et mort cellulaire programmée). Une étude comparative avec un autre alphavirus (virus Sindbis, SINV), a également été réalisée. Les expériences menées in-vitro ont révélé que moins de 5% des cellules RAW264.7 sont infectées avec une production stable et constante de particules virales au cours du temps de l'infection (8-48h). La capacité du virus à se répliquer dans les macrophages a été confirmée par la présence des brins d‟ARN viraux positifs et négatifs (RT-qPCR) ainsi que des ARN doubles brins (immunofluorescence avec l‟anticorps J2). Cependant, aucune particule virale infectieuse ne semble être libérée par les cellules infectées. Étonnamment, l'infection ne se traduit pas par une réponse marquée IFN (IFN-α/β et ISG56). Une expression accrue de TNF-α, de GM-CSF et d‟IL-6 a été mis en évidence tandis que l'IFN-γ, l‟IL-1α, l‟IL-2, l‟IL-4, l‟IL-5, l‟IL-10 ou encore l‟IL-17 ne subissent aucune modulation de leur expression suite à l'exposition des macrophages au CHIKV (ELISA, FACS large). En outre, et contrairement aux cellules astrocytaires CLTT (contrôle positif), les cellules RAW264.7 infectées ne mobilisent pas les mécanismes de l‟apoptose afin de contrôler l'infection par le CHIKV. En comparaison avec les cellules RAW264.7, l'infection des macrophages par le virus SINV révèle une augmentation significative de l‟expression des PRRs tels que TLR-3, RIG-I et MDA5, de l‟IFN de type I (IFNα4, PKR, ISG15/54/56) ainsi que l‟activation de l'apoptose. En outre, l'expression élevée de facteurs pro-angiogéniques tels que PDGFB a été observée dans les cellules infectées par le CHIKV. Ces données montrent clairement que le CHIKV peut infecter les macrophages qui n‟engagent néanmoins pas, en retour, de réponse IFN ou les mécanismes de l'apoptose à même de contrôler l‟infection et pouvant de ce fait contribuer à la persistance du virus. Cependant, la robuste réponse pro-inflammatoire induite par le TNF-α et la production de facteurs pro-angiogénique tels que le PDGFB peuvent contribuer à l'arthrite. Nous avons également mis en évidence que les macrophages RAW peuvent réagir différemment aux virus du même genre (CHIKV et SINV). Le modèle d‟infection cellulaire de la lignée murine macrophagique RAW264.7 qui a été développé constitue un nouvel outil pour l‟étude de l‟interaction hôte/virus qui doit permettre d'une meilleure compréhension de certains mécanismes pathologiques associées aux infections chroniques post-CHIKV/Alphavirus.