Conception organisationnelle : pour des interventions capacitantes.
Auteur / Autrice : | Justine Arnoud |
Direction : | Pierre Falzon |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Ergonomie |
Date : | Soutenance le 06/12/2013 |
Etablissement(s) : | Paris, CNAM |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Abbé Grégoire (Paris) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Centre de recherche sur le travail et le développement (2007-... ; Paris) |
Jury : | Président / Présidente : Mathieu Detchessahar |
Examinateurs / Examinatrices : Johann Petit, Luc Deroche | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Sandrine Caroly, Philippe Lorino |
Résumé
Cette thèse d’ergonomie s'inscrit dans le champ de l'organisation. Les nouvelles formes d'organisation et l'accroissement des activités de service soulèvent de nouveaux enjeux qui invitent l'ergonomie à se préoccuper de l'objet « organisation » et à échanger avec les sciences de gestion. Progressivement, une vision instrumentale de cet objet est proposée permettant de rompre avec les approches classiques et de penser l’articulation entre la structure organisationnelle et les mécanismes d’appropriation. L'ergonomie apparaît alors légitime à intervenir sur cet objet : ses objectifs et sa contribution historique aux savoirs de conception facilitent sa participation aux transformations de l'organisation. La thèse défendue est que l'organisation doit être conçue ou reconçue sous l'angle du développement. Le développement dont il est question ici est emprunté aux travaux à focalisation économique et renvoie plus spécifiquement à l'approche par les capabilités. Cette approche s'intéresse à ce que chaque individu est réellement en mesure de faire. Ceci suppose un environnement favorable, dit « capacitant », qui doit guider l'action de l'ergonome. En poursuivant cet objectif, l'ergonome développe des méthodologies d'intervention qui peuvent également porter les prémices d'une organisation « capacitante » propice aux débats, à la construction de l'activité et au travail d'organisation.Dans cette optique, une recherche a été conduite à l’occasion de la mise en place d’un Centre de Services Partagés au sein d'un grand groupe. Une méthodologie de recherche et d'expérimentation a été définie en fonction des possibilités du contexte. Elle comporte trois étapes.La première étape analyse l'existant, identifie les questions non résolues par l'organisation et caractérise les déterminants des contradictions auxquelles l'activité doit faire face. Elle met en évidence que la structure organisationnelle, pensée par d'autres, a été imposée aux acteurs. De manière générale, les opportunités de choix, le rayon d'action et les possibilités effectives de réaliser un travail de qualité diminuent par rapport à la situation avant le changement. La seconde étape s'intéresse à la manière dont les opérateurs tentent de reconcevoir l'organisation dans l'usage. La façon dont ces tentatives sont discutées, leurs coûts et leurs effets sur la structure organisationnelle sont ensuite analysés. Il ressort que les opérateurs tentent de transformer les ressources en capabilités c'est-à-dire en possibilités effectives de faire un travail de la meilleure qualité possible. Pour cela, l'organisation du travail est modifiée, les procédures remises en question et contournées : le « client » est progressivement transformé en partenaire de l'activité mais dans un contexte contraint et figé. La troisième étape vise, à partir des pratiques et des souhaits des acteurs, à tester in situ une méthodologie de changement, la co-analyse constructive des pratiques. Cette méthodologie cherche à expérimenter une organisation capacitante et a pour objectif d’établir un environnement capacitant, favorable au déploiement de l'activité et à la réussite des acteurs. Des visites sont organisées afin d’inviter chaque opérateur à observer l'activité de son partenaire. L'activité « ici et maintenant » constitue alors un objet de dialogues, facilitant une pratique réflexive sur l'activité collective conjointe et une transformation des règles et pratiques. Ainsi, la recherche-expérimentation menée conduit à de nouvelles solutions organisationnelles et à la mise en mouvement de l'organisation. Le développement apparaît dès lors comme un objectif et un moyen de l'action menée. L'analyse diagnostique permet d'identifier ce qui autorise et entrave ce développement. L'action ergonomique est ensuite construite de façon à favoriser ce développement au cours même de l’action et a posteriori.