Thèse soutenue

Au filtre de la nuit : le nocturne dans l'art américain, 1890-1917

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Auteur / Autrice : Hélène Valance
Direction : François Brunet
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Etudes anglophones
Date : Soutenance en 2012
Etablissement(s) : Paris 7

Résumé

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Après que James Mc Neill Whistler a renouvelé le genre du paysage de clair de lune en peinture avec ses fameux Nocturnes, les milieux artistiques américains manifestent, au tournant du 20ème siècle, un profond engouement pour la nuit. Alors que les artistes du nocturne, et bon nombre de critiques et d'historiens de l'art à leur suite, s'attachent à distinguer leur art de son environnement matériel, ce travail consiste à replacer les nocturnes dans leur contexte historique, en considérant le rôle qu'ils prennent dans la culture visuelle de leur époque. Alors que le paysage nocturne américain se trouve radicalement altéré par le développement de l'éclairage électrique, le repli des artistes du nocturne vers des scènes de clair de lune rurales et désertes apparaît comme une réaction anti-moderne. Mais au-delà du contexte immédiat de l'électricité, la peinture de la nuit fonctionne comme un espace de représentation permettant de traiter indirectement des changements historiques qui affectent le pays. La première partie de cette étude considère les nocturnes comme une réponse aux transformations qui affectent l'ordre du visuel à la fin du 19ème et au début du 20ème siècles, de la redéfinition des limites entre visible et invisible à la croissance exponentielle du nombre des images, et propose de lire les nocturnes comme une forme d'anti-vision. Une seconde partie envisage la nuit dans ses valeurs métaphoriques, en particulier raciales, dans les discours qui font des Indiens d'Amérique un people voué à disparaitre dans la nuit ou qui promeuvent l'entreprise impérialiste comme une mission éclairée. La troisième et dernière partie de ce projet s'attache aux représentations de la nuit urbaine, montrant comment les artistes du nocturne négocient les reconfigurations des identités sociales par le biais d'une refonte du paysage pictural. Il s'agit ici de démontrer que les nocturnes constituent un art anti-moderne, au sens que Jackson Lears donne à ce terme : s'ils dénotent un certain rejet de la modernité, ils offrent aussi dans une certaine mesure une forme d'adaptation aux changements qu'ils tentent de maintenir à distance. En ce sens, les nocturnes forment un portrait négatif des Etats-Unis au tournant du siècle.