Modulation des fonctions des cellules inflammatoires par la galectine-3 et la jacaline
Auteur / Autrice : | Clàudia Danella Polli |
Direction : | Gabriela Silva Bisson, Lise Halbwachs-Mecarelli |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sciences de la vie |
Date : | Soutenance en 2012 |
Etablissement(s) : | Paris 6 en cotutelle avec Sao Paulo |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
Macrophages et neutrophiles associés aux tumeurs (TAM / TAN) ont des rôles ambigus et complexes dans le processus de la cancérogenèse, le phénotype de ces cellules pouvant être modulé par le microenvironnement de la tumeur. Plusieurs facteurs sont impliqués dans les interactions entre TAM / TAN et les cellules cancéreuses, comme les cytokines, les chimiokines et les facteurs de croissance et angiogéniques. Une meilleure compréhension des mécanismes qui régulent les fonctions de TAM / TAN est cruciale pour pouvoir interférer avec la différenciation de ces cellules, en les orientant vers des phénotypes anti- tumoraux. Dans la première partie de cette étude, nous avons étudié le rôle de la galectine -3 (Gal-3) dans la régulation de l’inflammation. La galectine -3, une lectine endogène liant les β -galactosides, est localisée dans le cytoplasme ou en extracellulaire et sécrétée par diverses cellules inflammatoires. Les études avec des animaux déficients en Gal-3 soulignent le rôle crucial de cette lectine dans les réactions inflammatoires, mais, la Gal-3 ayant une distribution ubiquitaire, ces travaux ne peuvent pas distinguer les effets de la Gal-3 intracellulaire de celle extracellulaire. La modulation de la réponse des neutrophiles par Gal-3 a été décrite avec des résultats contradictoires concernant la nécessité de pré- activation des cellules. Dans notre étude, nous nous concentrons sur les effets extracellulaires de la Gal-3 sur les fonctions des neutrophiles humains. Bien que Gal-3 est fortement exprimé au niveau intracellulaire dans les neutrophiles, comme le montre l'analyse des lysats cellulaires par Western Blot, nous n'avons pas pu détecter Gal-3 sur la surface des neutrophiles au repos ou activés. Le Gal-3 exogène recombinante se liait aux neutrophiles par son domaine lectine (liaison inhibée par le lactose), et cette liaison était considérablement augmentée (60%) sur les neutrophiles activés par du fMLP. Nous avons observé par immunofluorescence une liaison homogène de la Gal-3 recombinante biotinylée aux neutrophiles conservés à 4° C. Le transfert des neutrophiles à 37 ° C a eu comme effet un regroupement de la Gal- 3 lié à la surface de la cellule (capping), avec une colocalisation de cette lectine avec les molécules CD66 (ligand connu de la galectine -3) et de CD43 (leucosialine), mais pas avec les molécules d'intégrine CD11b/CD18. Le liaison de Gal-3 déclenchait la dégranulation de neutrophiles, révélée par l'augmentation de l'expression de CD11b. Par ailleurs, la lectine était capable de potentialiser l'expression de CD11b induite par une concentration sous-optimale de TNF- α (1 ng / ml). Cependant, Gal-3 n'était pas capable de déclencher la production d'espèces réactives de l'oxygène par les neutrophiles, même après stimulation préalable avec le TNF- α. Enfin, Gal-3 était capable de déclencher l’adhérence des neutrophiles à la gelatine de manière dose-dépendante. Ces effets de la Gal 3 recombinante n'étaient pas dus à une contamination par du LPS, car la pré-incubation de Gal-3 avec de la polymyxine B ne modifiait pas sa capacité à activer les neutrophiles. Dans l’ensamble, nos résultats montrent que la Gal- 3 exogène active à la fois les neutrophiles naïfs et les neutrophiles activés, éventuellement par des interactions avec CD66 et CD43, confirmant les fonctions pro-inflammatoires de cette lectine. Dans la deuxième partie de cette étude, nous avons étudié la modulation de l'activité antitumorale des macrophages par la galectine -3 et la lectine végétale jacaline. Nous avons d’abord évalué l'effet direct de ces lectines sur des lignées cellulaires de cancer du côlon (HT- 29) et du sein (MCF- 7). Nous avons constaté que les lectines se liaient à la surface des cellules tumorales essentiellement par leurs domaines de reconnaissance de glucides (DGL), ces liaisons étant inhibées par des sucres spécifiques. La Gal-3 ou la jacaline n'affectaient pas la prolifération cellulaire tumorale, mesurée par le test de MTT. Les lectines se liaient à la surface des macrophages, également par les domaines DGL, induisant la production de cytokines par ces cellules. Le Gal-3 avait comme effet une augmentation de l'expression du TGF- β, tandis que la jacaline augmentait l'expression de TNF- α, TGF- β, IL- 1β et MIP- 1α. Les lectines ne modifiaient pas l'expression de CXCL8, CCL2, IL-10, IL- 12p35 et IL- 12p40. Des niveaux élevés de TNF et d'IL- 6, évalués par ELISA, ont été détectés dans les surnageants de macrophages stimulés avec la jacaline ou la Gal-3. Des niveaux élevés d'IL- 10 et IL- 1β ont également été détectés dans le surnageant de ces cellules. Toutefois, les lectines n'avaient pas d'effet sur la production de MMP9 et d'oxyde nitrique par les macrophages. Comme les cytokines pro-inflammatoires étaient principalement produites par les macrophages en réponse à la stimulation par Gal-3 ou jacaline, nous avons evalué si cela impliquait la voie de signalisation NF- kB. Nous avons observé que seule la jacaline était capable d'activer ce facteur de transcription. Ces résultats suggèrent que les lectines polarisent les macrophages vers un phenotype pro -inflammatoire anti- tumorale (M1). Ainsi, nous avons étudié l'activité antitumorale des macrophages stimulés par les lectines. L'incubation des cellules HT-29 ou MCF- 7 avec des surnageants de macrophages stimulés par la Gal-3 ou la jacaline entraînait une diminution de la viabilité de ces cellules, détectée par un test MTT. En plus, l'analyse par cytométrie de flux en utilisant l'annexine V a montré une apoptose des cellules tumorales. En résumé, ces résultats indiquent que Gal-3 et jacaline, par leurs activités pro-inflammatoires, peuvent diriger les macrophages vers un phénotype anti-tumorale.