Thèse soutenue

Concilier production agricole et biodiversité : le rôle de l’intensité et de son allocation spatiale

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Auteur / Autrice : Félix Teillard d'Eyry
Direction : Muriel TichitLuc Doyen
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Biologie
Date : Soutenance le 31/10/2012
Etablissement(s) : Paris 5
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Frontières de l'innovation en recherche et éducation (Paris ; 2006-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Sciences pour l'Action et le Développement : Activités, Produits, Territoires
Jury : Président / Présidente : Isabelle Dajoz
Examinateurs / Examinatrices : Muriel Tichit, Luc Doyen, Isabelle Dajoz, Joern Fischer, Simon Butler, Jean-François Soussana, Jeroen C. J. Groot
Rapporteurs / Rapporteuses : Joern Fischer, Simon Butler

Résumé

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L'intensification de l'agriculture a joué un rôle crucial pour augmenter la production alimentaire au cours des dernières décennies. Plusieurs processus liés à l'intensification ont aussi causé d'importants dommages environnementaux, sur la biodiversité en particulier. L'agriculture doit aujourd'hui faire face au défi de satisfaire à une demande alimentaire croissante tout en améliorant son impact environnemental et sa durabilité. Il est nécessaire de connaître la forme de la relation entre biodiversité et intensité agricole pour déterminer où les politiques de conservation seront les plus efficaces et quelles allocations spatiales de l'intensité permettront de concilier production et biodiversité. Il existe peu de preuves empiriques de la forme de cette relation, de plus, l'influence de l'arrangement spatial de l'intensité sur la biodiversité demeure inconnue. Cette thèse avait pour objectif de déterminer comment cibler l'intensité agricole et son allocation spatiale afin d'atteindre des objectifs à la fois productifs et environnementaux. Afin de répondre à cette question, nous avons adopté une approche à l'échelle de la France entière, en couplant des bases de données décrivant l'agriculture et des oiseaux spécialistes des milieux agricoles à cette échelle. Nous avons caractérisé un gradient d'intensité à l'échelle du pays et étudié une communauté d'oiseaux spécialistes des milieux agricoles tout au long de ce gradient. Plusieurs descripteurs de cette communauté ont été utilisés, renseignant sa taille (richesse spécifique) mais aussi sa composition (spécialisation, niveau trophique, habitat). L'intensité agricole et les communautés d'oiseaux ont été reliées au niveau de la Petite Région Agricole (PRA; largeur moyenne = 22.4 km). Tout d'abord, nous avons développé une méthode permettant d'estimer un indicateur d'intensité agricole basé sur le coût intrant par hectare, au niveau de la PRA. Cet indicateur fournit une valeur d'intensité continue, pertinente à la fois pour les systèmes d'élevage et de culture. Ensuite, nous avons examiné les effets d'un gradient d'utilisation des sols (des prairies aux grandes cultures) et de leur hétérogénéité, sur la communauté d'oiseaux. L'hétérogénéité a un effet négatif sur les espèces spécialistes car elle entraine la perte de leur habitat. En revanche, elle avantage les espèces généralistes. Lors d'une troisième étape, nous avons montré que la communauté d'oiseaux était significativement influencée par l'intensité. Le long du gradient des espèces « gagnantes » remplacent des espèces « perdantes », ce changement étant plus marqué aux faibles intensités. L'effet de l'intensité sur la communauté d'oiseaux est renforcé par son agrégation spatiale. Enfin, les relations entre l'intensité, la communauté d'oiseaux, et les performances productives et économiques ont été intégrées dans un modèle d'optimisation de l'allocation de l'intensité. Les allocations optimales révèlent des solutions gagnant-non-perdant entre les trois critères de performance (biodiversité, production et économie). Ces allocations optimales correspondent à des modifications d'intensité ciblées: beaucoup de petits changements, favorisant des zones homogènes et extensives dans le cas d'un scénario d'extensification, à l'opposé de changements importants et moins nombreux, favorisant plus d'hétérogénéité, dans le cas d'un scénario d'intensification. Cette thèse apporte une des premières démonstrations de l'influence de l'agrégation spatiale de l'intensité sur la relation entre biodiversité et intensité. Nos résultats révèlent une opportunité pour améliorer l'efficacité des politiques de conservation de la biodiversité à l'échelle nationale. Il s'agit d'un ciblage de ces politiques, qui devra être différent pour maximiser la biodiversité à coût productif réduit ou pour augmenter la production tout en limitant les dommages sur la biodiversité