Thèse de doctorat en Ecologie, évolution, ressources génétiques, paléontologie
Sous la direction de Anne Charmantier et de Dany Garant.
Soutenue le 07-12-2012
à Montpellier 2 en cotutelle avec l'Université de Sherbrooke (Québec, Canada) , dans le cadre de Systèmes Intégrés en Biologie, Agronomie, Géosciences, Hydrosciences, Environnement (Montpellier ; École Doctorale ; 2009-2015) , en partenariat avec Centre d'écologie fonctionnelle et évolutive (Montpellier) (laboratoire) .
Le président du jury était Fanie Pelletier.
Le jury était composé de Anne Charmantier, Dany Garant, Fanie Pelletier, Denis Réale, Phillip Gienapp.
Les rapporteurs étaient Denis Réale, Phillip Gienapp.
Le maintien des populations en milieu naturel dépend de leur capacité à répondre aux changements de leur environnement et aux pressions de sélection qui en découlent. Deux mécanismes principaux permettent aux organismes de s'ajuster à de nouvelles conditions environnementales tout en assurant leur maintien local : la plasticité phénotypique, soit un ajustement du phénotype sans modifications génétiques sous-jacentes; et l'adaptation, processus par lequel les génotypes les mieux adaptés aux conditions environnementales se retrouvent progressivement en plus grande proportion au sein d'une population. Or, le potentiel de réponses plastiques et génétiques peut varier entre populations d'une même espèce, entre autres puisqu'il est lui-même dépendant de l'hétérogénéité spatio-temporelle de l'environnement. Cependant, nous avons à ce jour peu de connaissances sur la façon dont l'environnement affecte les patrons de plasticité phénotypique et le potentiel adaptatif des populations en milieu naturel, rendant difficile la prédiction de la réponse des populations face aux changements environnementaux. Mon doctorat vise à comprendre comment l'hétérogénéité environnementale affecte la capacité des populations naturelles à répondre, par le biais de changements plastiques et/ou génétiques, aux changements environnementaux. Pour ce faire, j'ai étudié des populations de mésanges bleues (Cyanistes caeruleus) occupant différents types d'habitats forestiers (caducifoliés et sempervirents) de la Corse et du Sud de la France. Ce système présente une grande hétérogénéité environnementale de par la grande variabilité des périodes de disponibilité et d'abondance de nourriture entre habitats caducifoliés et sempervirents, les premiers étant plus hâtifs et riches en ressources que les seconds. En utilisant une base de données phénotypiques à long terme, des pedigrees disponibles pour chaque population, et de l'information obtenue à partir de marqueurs microsatellites, j'ai déterminé: i) les patrons de plasticité phénotypique au sein de chaque population; ii) les niveaux de potentiel adaptatif de traits morphologiques et reproducteurs au sein de chaque population; et iii) la structuration génétique de populations au sein d'un paysage hétérogène. Ensuite, j'ai mis en relation ces patrons avec diverses variables environnementales afin de comprendre comment l'hétérogénéité spatio-temporelle de l'environnement affecte ces paramètres. Mon projet de doctorat a d'abord montré une grande variabilité dans la capacité des populations d'une même espèce à s'ajuster aux conditions environnementales, et ce même à fine échelle géographique. J'ai également mis en évidence l'effet de différentes composantes de l'environnement sur les paramètres affectant la réponse adaptative des populations: la présence de variabilité interindividuelle des patrons de plasticité au sein d'une population est favorisée par l'hétérogénéité spatio-temporelle de l'habitat; les différences de potentiel adaptatif intra-populations au niveau de traits morphologiques sont reliées à la qualité de l'environnement; et la structure génétique des populations serait la résultante de contrastes écologiques entre populations. Mon doctorat a donc contribué à la compréhension des mécanismes influençant la capacité des populations à s'ajuster à des conditions environnementales changeantes, permettant ultimement une meilleure prédiction des réponses des populations face aux changements environnementaux.
Effects of environmental heterogeneity on phenotypic plasticity patterns and genetic variability of blue tit (Cyanistes caeruleus) populations in the wild.
The persistence of natural populations depend on their ability to phenotypically adjust to the environmental changes they experience. These adjusments can be realized through two main mechanisms: phenotypic plasticity, the ability for an individual to adjust its phenotype according to the environment, without underlying genetic change; and adaptation, the process by which better adapted genotypes become progressively more abundant in a population. However, the ability to respond to environmental changes by means of plastic/genetic changes itself varies according to environmental heterogeneity, thus showing great variability among populations of the same species. To this date, our knowledge of the effects of environmental heterogeneity on phenotypic plasticity patterns and adaptive potential of wild populations is still limited, impeding our ability to predict a population's response to environmental changes.The main objective of my research is to understand how environmental heterogeneity affects the ability of wild populations to respond plastically or genetically to environmental changes. I studied blue tit (Cyanistes caeruleus) populations residing in contrasted forest habitats (deciduous or evergreen) of Corsica and Southern France. This system provides an excellent opportunity to investigate the effects of environmental heterogeneity due to the great environmental variability in terms of resource abundance and phenology, deciduous forests reaching a greater and earlier food peak abundance than evergreen forests. Using long-term phenotypic data, pedigree information, and microsatellite data, I assessed in a first step: i) population-specific phenotypic plasticity patterns; ii) levels of adaptive potential for morphological and life-history traits; and iii) population genetic structure of Corsican blue tits. In a second step, I correlated these patterns with environmental data, in order to investigate how environmental heterogeneity affected the ability of populations to phenotypically adapt to environmental changes.My results first showed great variability in the ability of several populations of the same species to adjust to environmental changes, even at a small spatial scale. I also showed the effects of different components of the environments on the adaptive response of populations: the presence of interindividual variability in plasticity patterns was favoured by environmental heterogeneity; within-population temporal variation in terms of adaptive potential of morphological traits was related to interannual differences in habitat quality, and genetic differences among populations was linked to ecological contrasts between populations. My Ph.D. therefore contributed to the understanding of mechanisms influencing the ability of populations to adjust phenotypically to environmental changes, ultimately allowing for a better prediction of a population's response to environmental changes.