Thèse soutenue

Objets-environnements, des interfaces biomimétiques entre arts plastiques et design, en France, de 1993 à nos jours

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Auteur / Autrice : Aurélie Michel
Direction : Sylvie Thiéblemont-DolletClaire Lahuerta
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Arts plastiques
Date : Soutenance le 07/12/2012
Etablissement(s) : Université de Lorraine
Ecole(s) doctorale(s) : Ecole doctorale Perspectives Interculturelles : Ecrits, Médias, Espaces, Sociétés (PIEMES) (Metz-Nancy)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de Recherche sur les Médiations (Lorraine)
Jury : Président / Présidente : Dominique Clévenot
Rapporteurs / Rapporteuses : Éliane Chiron, Hélène Sorbé

Mots clés

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Mots clés contrôlés

Résumé

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L’observation des productions actuelles fait apparaitre une tendance à l’hybridation des disciplines. Ce constat touche en particulier un type de pratique design, qui s’oriente de plus en plus vers la conception d’objets en petites séries ou en pièces uniques, interrogeant le rapport de l’usager aux espaces familiers et plus spécifiquement à la sphère intime. Bien que la plupart des designers refusent le rapprochement de leur travail avec les Arts Plastiques, il n’en demeure pas moins que certains d’entre eux adoptent des démarches analogues à celles des plasticiens. La formulation de cette hypothèse interroge la validité des catégories en vigueur et la légitimité des lois qui président à leur constitution. Par ailleurs, la production des designers qui intègrent une démarche similaire à celles des artistes se construit sur un mode évolutif, faisant croître l’objet vers l’installation, une forme de pénétrable que peut expérimenter le spectateur/usager. Il suffit d’examiner les variations d’échelles et la répétition modulaire créant une architecture mouvante chez Ronan et Erwan Bouroullec pour comprendre les glissements opérés entre l’unité et l’environnement qu’elle construit. La manipulation des échelles questionne, au cœur de l’espace même (qu’il s’agisse du cadre institutionnel de l’exposition ou de la sphère personnelle de chaque individu), la classification des objets, ainsi que leur hiérarchisation. Ces problématiques sont propres à un type de pratique, dont la poïétique use du détournement des produits de la nature et, notamment, des trois règnes animal, végétal et minéral. La transposition de pratiques naturalistes visant à établir un dépaysement par l’objet (au sens d’un déplacement hors d’un contexte habituel) découle d’une réflexion autour des modalités de l’hybridation. Ainsi, lorsqu’on se penche sur les textes jalonnant l’histoire naturelle et, en particulier sur ceux traitant des problématiques de classification, d’Aristote à Pline l’Ancien, en passant par la nomenclature de Carl von Linné, on remarque la récurrence (ou « survivance » pour reprendre la formule initiée par Georges Didi-Huberman), d’éléments situés dans l’entre-deux. Ces « types », que nous pouvons qualifier d’« aléatoires » révèlent un déplacement constant de la norme et questionnent la détermination du monstre. À partir de quel moment pouvons-nous juger du caractère anormal de tel élément ? N’existe-t’il pas des objets, qui, tout en présentant tous les « symptômes » du monstre coïncident malgré tout avec les modèles établis ? L’analyse des pratiques actuelles convoquant des démarches de création à la croisée des Arts Plastiques et du design révèle une influence profonde de ce type de fabrique pour un imaginaire scientifique, qui prend sa source dans le theatrum mundi des cabinets de curiosités. D’ailleurs, on observe, depuis le début des années 1990 (et surtout suite à la constitution de la collection d’art contemporain Curios & Mirabilia par Jean-Hubert Martin en 1993, visant à confronter un lieu chargé d’histoire, le château d’Oiron à la production d’artistes divers) une recrudescence des expositions empruntant la forme des cabinets de curiosités, afin de susciter un intérêt renouvelé pour l’objet d’art et en particulier les échos foisonnants entre les artefacts (œuvres et objets d’art, même s’ils prennent l’apparence d’installation) et l’univers poétique de la nature, manifestation viscérale d’un retour aux origines. Ainsi, l’emprunt symbolique de la figure des « zoophytes » ou plantes-animaux, mentionnés dans les traités d’histoire naturelle les plus anciens nous permet d’interroger la transversalité des pratiques artistiques qui cherchent à provoquer un décloisonnement des disciplines, en faisant de l’objet une entité située à la croisée des démarches de création.