Le cerf, le temps et l'espace mythiques
Auteur / Autrice : | Yves Chetcuti |
Direction : | Philippe Walter |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Lettres et Arts |
Date : | Soutenance le 06/12/2012 |
Etablissement(s) : | Grenoble |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale langues, littératures et sciences humaines (Grenoble, Isère, France ; 1991-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Equipe de recherche : Centre de recherche sur l'imaginaire (Grenoble ; 1966-2014) |
Jury : | Président / Présidente : Claude Lecouteux |
Rapporteur / Rapporteuse : Claude Lecouteux, Carlo Donà |
Mots clés
Résumé
Cette thèse propose de rapprocher l'histoire naturelle du cerf, appréhendée à travers les écrits des naturalistes et des veneurs, de l'ethnohistoire de l'Europe occidentale. Il s'agit donc de confronter des récits censés être vrais parce que fondés sur des faits observables, à des récits explicitement imaginaires. Nous avons modifié la définition du mythème développée par Claude Lévi-Strauss, à partir des termes narratifs (T) et leur inverse (T-1), et des fonctions narratives (F) et leur inverse (F-1). Nous définissons le mythème comme la combinaison des quatre versions possibles d'un récit, la version TF et la version contraposée T-1F-1, mais aussi les variantes TF-1 ou T-1F ; à la suite de Lévi-Strauss, nous considérons un mythe comme l'ensemble de ses variantes. Comme les objets réels existent indépendamment des usages et des représentations que peuvent en avoir les communautés humaines, des mythèmes ont été formulés relativement au cerf, à sa place dans l'environnement, aux bonnes façons d'employer son cœur, son cuir ou son bois pour signifier le cours du temps ou le destin des hommes. Nous avons isolé une vingtaine de ces mythèmes et les avons classés par ordre croissant d'abstraction, en considérant que chacun d'eux permettait de figer une relation entre termes et fonctions narratives, ou de résoudre une dissonance cognitive. Pour autant, aucun récit ne prétend relier entre eux tous ces mythèmes. La plupart ne sont reliés entre eux que de façon elliptique, la narration ne donnant pas les détails nécessaires à la vraisemblance ou à la véracité des récits. Pour y remédier, nous montrons l'existence, dans les rites religieux contemporains de Bretagne, d'un repérage cohérent des directions cardinales et intermédiaires, fondé sur les levers et couchers solaires aux solstices. A partir des indications horaires et directionnelles, puis des indications horaires et calendaires, nous restituons les dates dédiées aux saints hommes au cerf, l'agencement des sites de culte entre eux et la forme des trajets de procession, au solstice d'été. Par extrapolation à des niveaux supérieurs de l'échelle des grandeurs spatiales, nous restituons trois types de parcours rituels ; en l'état actuel du dossier, la relation entre le rite et son ampleur territoriale ne permet pas de présumer de la fonction sociale des trajets à l'échelle nationale ou européenne. En extrapolant aux niveaux inférieurs de l'échelle temporelle nous restituons les « unités » de calcul calendaire inférieures à la journée, en particulier la fréquence cardiaque de repos (60 battements par minute chez l'Homme). Le rapprochement est fait entre la métrique temporelle, écartelé entre ses cadences rapide (le pouls cardiaque) et lente (la précession des équinoxes), et la métrique spatiale, opposant le microcosme domestique au macrocosme borné par la « sphère des fixes ». S'en déduit intuitivement la fonction sociale des thèmes relatifs aux niveaux inférieurs des échelles de grandeur: le cœur, la maisonnée, etc... Une interprétation distincte des rites estivaux et hivernaux est alors proposée, à partir des récits mythiques des Celtes insulaires.